31/01/2015 – 07H00 Stockholm (Breizh-info.com) – La Suède est officiellement devenue – en ce mois de janvier 2015 – une dictature politique, c’est à dire étymologiquement, un pays dans lequel un groupe de personnes exercent tous les pouvoirs de façon absolue, sans qu’aucune loi ou institution ne les limite.
Alors que les médias occidentaux sont prompts à dénoncer les gouvernements russe, nord-coréen ou iranien et que le monde politique français aime à donner leçon de démocratie aux monde entier, un grand silence presque complice entoure la situation suédoise.
Lors des dernières élections législatives en Suède qui ont eu lieu en septembre 2014, le parti des Démocrates Suédois, équivalent local du Front National, a réalisé une percée historique en emportant 12,9% (5,70 en 2010) des suffrages, ce qui fait de lui la troisième force politique du pays derrière le parti social-démocrate (31%) et le parti du rassemblement modéré (droite, 23,3%).
Dans la foulée, le gouvernement suédois (gauche) dirigé désormais par le premier Ministre Stefan Löfven a tenté, appuyé par ses alliés Verts , de faire voter le budget à l’Assemblée, mi-septembre. Un budget qui a été retoqué suite à la fronde menée par les Démocrates Suédois rejoints par d’autres partis de droite, qui exigeaient notamment la baisse des moyens alloués en faveur de l’immigration – massive depuis des années dans ce pays scandinave (entre 80 000 et 100 000 entrées par an pour un pays de 10 millions d’habitants, ce qui change en profondeur cette société). Une immigration en forte corrélation – pour ne citer que cela – avec l’explosion du nombre de viols dans ce pays, 60 000 par an, soit 20 fois plus que dans les autres pays de l’Union Européenne. Une immigration majoritairement musulmane, qui n’est pas sans conséquences sur le vivre ensemble traditionnel de ce pays.
Suite à cette alliance pour bloquer le budget souhaité par le gouvernement suédois – mis de facto en minorité sur la question au Riksdag, le parlement suédois – il restait alors trois possibilités au Premier ministre pour sortir de la crise : démissionner, accepter la proposition de budget de l’opposition, ou bien convoqué de nouvelles élections législatives anticipées.
C’est ce dernier choix qui avait été retenu début décembre en annonçant la tenue de nouvelles élections le 22 mars 2015. En France, une telle situation aurait entrainé la démission du gouvernement et la dissolution de l’Assemblée nationale.
Mais les sondages de décembre publiés en Suède prévoyant une percée beaucoup plus forte du parti des Démocrates Suèdois (jusqu’à 17,7% sachant que lors des élections de 2014, les sondages avaient minoré le vote patriote) et une baisse des voix en faveur des sociaux-démocrates locaux, cela laissait présager un pays quasiment ingouvernable après les législatives vu qu’aucune majorité nette ne se serait dégagée.
Devant cette perspective -il était hors de question pour lui de permettre au parti des Démocrates Suédois de prendre le dessus – le Premier ministre, Stefan Löfven fait volte face fin décembre : plus d’élections anticipées, et un accord trouvé avec les partis d’opposition de droite et du centre, une sorte d’unité nationale mettant hors jeu au moins 13% des électeurs.
Objet de l’accord entre le Parti social démocrate du chef du gouvernement, les Verts, membres de la coalition, et les partis d’opposition de centre droit de l’Alliance – les Modérés, le Parti du centre, les libéraux et les chrétiens-démocrates : Stefan Lofven devra appliquer le budget de l’opposition voté au parlement, avec la possibilité toutefois de le modifier au printemps. L’Alliance s’abstiendra et ne votera pas contre les budgets du gouvernement, selon l’accord qui est vaut jusqu’en 2022. Les deux parties ont également conclu de se coordonner sur les politiques de retraite, de défense et sur l’énergie.
Traduction : pas d’élections ni de nouveau gouvernement en Suède jusqu’en 2022 – alors qu’il en était prévu en 2019 – au nom de l’unité nationale qui exclut de la scène politique environ 20% des Suédois n’ayant pas voté pour cette grande alliance, plus les 20% d’abstentionnistes, ce qui fait quand même à minima 2,5 millions de Suédois (sur 10 millions) écartés de la société.
Voilà comment des observateurs suédois de la vie politique commentent d’ailleurs ce qui vient de se passer (traduction Contrepoints)
« L’accord de décembre peut valablement être décrit comme un coup d’État en douceur, qui engage la Suède sur la route de l’autodestruction.
En apparence, les institutions démocratiques de la Suède semblent intactes, mais à partir de maintenant elles ne sont plus qu’une coquille vide. L’accord de décembre organise ce qu’on pourrait définir comme un système parlementaire à deux faces. Le parlement officiel reste en place, mais dans l’ombre se tapit le parlement réel, constitué des chefs des sept partis du spectre politique traditionnel. Cette officine d’arrière-cour mène ses délibérations en secret, à l’abri de tout regard public. De temps à autre, elle présentera ses décisions au parlement, où la ratification ne sera qu’une formalité.
Le nouveau système peut aussi être décrit comme une « dictature consensuelle ». Quel qu’il soit, celui qui gouvernera dans les huit prochaines années aura dans la réalité des pouvoirs de type dictatorial : ses budgets, fondements de toute politique, disposent d’avance d’une garantie d’approbation. En plus du budget, les partis de l’union ont annoncé qu’ils rechercheraient l’unanimité sur les questions de défense, sécurité, pensions et énergie. »
La conclusion – révélatrice de ce que pense une large partie de la classe médiatique et politique française dominante – sera laissée au quotidien Le Monde, dont un journaliste écrivait fin décembre à propos du coup d’Etat suédois : « Une fois de plus, la Suède donne l’exemple. Confrontés à la perspective d’une crise politique prolongée, les partis politiques traditionnels, de gauche à droite, ont décidé de s’unir pour permettre au gouvernement de fonctionner en neutralisant la capacité de nuisance parlementaire du parti populiste. » On ne saurait être plus clair.
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