« Démagogique » et « vieilli » pour la gauche locale qui s’apprête à attaquer la délibération au tribunal administratif, « de bon sens » pour le maire Serge Grouard, la décision est surtout tout à fait légale. Elle se fonde sur l’article 3341 du code de la santé publique qui dispose qu’une « personne trouvée en état d’ivresse dans les lieux publics est, par mesure de police, conduite à ses frais dans le local de police ou de gendarmerie le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu’à ce qu’elle ait recouvré la raison. »
Fleurant bon le XIXe siècle dont il nous vient en droite ligne, l’article a donc été appliqué dans sa totalité par la ville d’Orléans, qui connaît chaque année « de 250 à 350 ivresses publiques manifestes » selon l’adjoint à la sécurité Olivier Geoffroy qui a détaillé certains des cas les plus récents qui lèvent le coin sur des fins de soirées pénibles entre alcool, débauche et danger pour autrui. Le maire d’Orléans complétant : « le centre ville est beau et sympa, ça ne l’est plus du tout quand on croise une personne dans cet état, ce qui est un trouble à l’ordre public doublé d’une ivresse manifeste« . Et un bon facteur anxiogène dans les nuits de nos centre-villes.
La disposition qui fait tant jaser n’est qu’une partie de la délibération, qui conduit à une véritable réorganisation de la prise en charge des IPM. Aujourd’hui, les policiers nationaux ou municipaux doivent calmer l’individu, le charger vers les plus proches urgences (qui à Orléans sont à 10 km du centre-ville à la Source), obtenir un certificat de non-hospitalisation, le ramener au commissariat et le placer en cellule de dégrisement pour la nuit (6 à 8 heures habituellement, plus si l’alcoolémie est plus forte). Tout ça occupe une patrouille de 2 à 4 agents pendant 1 h 30 à quatre heures, pendant lesquelles ni eux ni leur véhicule ne sont sur la voirie, ce qui est difficilement conciliable avec la baisse ou la stagnation des effectifs policiers nationaux et locaux qui entraine une exigence de productivité accrue pour les effectifs et le matériel.
La mairie d’Orléans a décidé de signer une convention avec SOS Médecins et la DDSP 45 afin de faire faire le certificat de non-prise en charge directement au commissariat dans une salle adaptée, ce qui a l’avantage énorme d’économiser beaucoup de temps aux forces de l’ordre (et de carburant), en plus de décharger des urgences passablement encombrées la nuit surtout en fin de semaine.
Alors que la gauche locale (PS, EELV, PCF) s’acharnait sur la disposition (qui a finalement été adoptée avec les voix des les élus de la majorité UDI-UMP et l’opposition FN), l’adjoint à la sécurité n’a pas boudé son plaisir pour annoncer que « une ville n’a pas attendu pour se manifester auprès de nous sur le dispositif, et cette ville c’est Nantes. Et évidemment on n’a pas caché notre plaisir pour les renseigner« . De source très proche du dossier, les questions des bretons portaient tant sur la convention avec SOS-Médecins que sur la possibilité de faire payer les personnes en état d’ivresse.
La capitale bretonne étant gérée par la gauche, la joie de l’adjoint à la sécurité, étoile montante de l’UMP loiretaine, est compréhensible. Pour la ville de Nantes, le nombre d’IPM étant sans commune mesure avec le nombre enregistré à Orléans, si bien que la ville a mis en place un plan alcool qui pourrait se voir ainsi étendu. Les Nantais quant à eux pourront se féliciter de la création d’une recette – même minime – qui ne soit pas issue de l’augmentation de leurs impôts.
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