’71. Un des films coup de poing de l’année 2014.

14/11/2014 ‑ 09H00 Belfast (Breizh-info.com) – Le cinéma britannique avait déjà frappé fort en 2014 avec le film « les poings contre les murs » de David Macenzie. Avec ’71, de Yann Demange, qui avait été présenté au festival du film britannique de Dinard et qui y avait remporté le prix du public, c’est un nouveau film coup de poing qui est sorti la semaine dernière dans les salles françaises.

Le film traite du conflit nord-irlandais en 1971, à Belfast. Gary – interprété par le prometteur Jack O’Connell – est une jeune recrue de l’armée anglaise, qui s’attendait à être envoyé sur un front hors d’Europe et qui se retrouve à Belfast, avec son régiment. La ville est alors plongée en pleine guerre civile et le régiment est missionné afin d’assurer le maintien de l’ordre, notamment dans les quartiers catholiques acquis à la réunification irlandaise.
Pris en embuscade dans une ruelle proche de Falls Road, le bastion des nationalistes irlandais, à la suite d’un contrôle musclé et inopiné, le régiment de Gary se voit contraint de battre en retraite sous la pression populaire.
Mais Gary – voulant sauver un de ses amis – se retrouve abandonné des siens, livré à lui même et repéré par des membres de l’IRA, début d’une nuit d’enfer pour la jeune recrue anglaise.
Une nuit durant laquelle celui qui n’était encore qu’un «bleu» va se retrouver en première ligne d’un conflit entamé depuis des décennies – un conflit auquel à titre individuel il est totalement étranger, ce qui n’est pas le cas de l’uniforme et du pays «occupant» qu’il représente.

Traqué par les soldats de l’IRA, mais également par les services secrets britanniques, de mèche avec les paramilitaires loyalistes nord-irlandais (UVF notamment) – qui souhaitent effacer toutes traces de leurs exactions à Belfast, Gary ressortira de cette «nuit d’orage» profondément transformé et marqué.

Alors que certains pourraient y voir « un film de plus sur le conflit nord-irlandais», ce ’71 se distingue clairement de ce qui a été fait avant par son refus du parti pris dans un conflit beaucoup plus compliqué que les observateurs voudraient le laisser entendre. Il n y a pas les salauds d’un côté et les bons de l’autre. La guerre transforme les hommes en héros, en ordures et en laisse d’autres dans un anonymat le plus total. C’est l’unique loi.
Ici, aucun romantisme ni aucune condamnation vis à vis de l’IRA, qui n’est qu’une armée face à une autre, l’armée anglaise, le troisième homme étant les forces paramilitaires loyalistes, qui ont joué pendant des années leur propre jeu, d’alliances en trahisons vis à vis de la couronne britannique.

Le film rappelle clairement « les guerriers de la nuit», ce film durant lequel un gang doit traverser tous les quartiers de New York et y affronter les gangs rivaux afin de survivre. L’ambiance sombre, glauque, mais aussi la violence et la musique appliquées au conflit en Ulster, on y trouve beaucoup de points communs avec le film de Walter Hill sorti en 1980.

Pendant 1h40, on reste scotché à son siège, et le spectateur se retrouve plongé au milieu d’une guerre civile violente, dramatique, qui a ensanglanté cette province irlandaise pendant plusieurs décennies – et qui l’ensanglante encore de temps à autre. La violence du film rendra sans doute mal à l’aise certaines personnes, mais n’est-ce pas aussi le rôle d’un cinéaste que de retranscrire des émotions inspirées de faits réels ?

Bien loin des superproductions américaines à la vision manichéiste, mais éloigné également de «la ballade irlandaise» de Brad Pitt dans le non-moins excellent «Ennemis Rapprochés», le film de Yann Demanges – son premier – révèle un réalisateur de talent et plein d’avenir.
Celui qui est né à Paris d’un père français et d’une mère algérienne mais qui a grandi à Londres est finalement bien inspiré d’avoir choisi le cinéma britannique plutôt que le cinéma français – ce dernier restant englué dans le politiquement correct et le conventionnel voire le très médiocre.

Alors que les prix d’entrée au cinéma flambent, notamment dans les grandes villes, le film ’71 mérite l’investissement plus que tout autre en cette fin d’année 2014.

Crédit photo  : DR
[cc] Breizh-info.com, 2014, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine.

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