15/09/2014 ‑ 07H00 Rennes (Breizh-info.com) ‑ Après avoir été plusieurs années à la tête du parquet de St-Brieuc, Gérard Zaug vient d’être nommé substitut général à la cour d’appel de Rennes. Une nouvelle affectation pour un magistrat controversé ayant eu à connaître plusieurs affaires qui en leur temps avaient défrayé l’actualité.
En 2009, dans l’affaire dite « Morfoisse », du nom de cet homme, chauffeur de camion, décédé le 22 juillet 2009 en transportant des algues Vertes, le procureur Zaug avait alors très rapidement décidé de classer l’affaire estimant qu « on ne peut pas faire de lien entre son décès et le fait qu’il transportait des algues vertes dans la benne de son camion » et concluant à « une récidive d’infarctus dy myocarde » touchant « un gros fumeur ». Des conclusions jugées hâtives par des juges d’instruction du pôle santé de Paris, qui ont décidé de rouvrir l’enquête, notamment suite à un rapport du DR Lesné. Une enquête ouverte donc et à laquelle est venue s’ajouter récemment une décision de la cour d’appel de Nantes qui reconnaissait la responsabilité de l’Etat dans le décès d’un cheval à St-Michel en Grèves lié à la prolifération des algues vertes.
En 2009 toujours, Gerard Zaug avait fait une sortie médiatique en faisant injonction à Gerard Huet, maire de Loudéac (réélu depuis) de marier un couple hispano-marocain dont l’un des membres se trouvait en situation irrégulière sur le territoire français. Le maire de Loudeac avait alors dénoncé « des pressions inacceptables de la part des services de l’Etat, du Procureur de la République ainsi que de la Ligue des droits de l’Homme m’obligeant à célébrer le mariage de deux étrangers » avant de poursuivre par la suite : « Alors que nous traversons une grave crise économique, comment aurais-je pu marier, sans m’y opposer, deux étrangers d’origine marocaine, plus préccupés de profiter de notre système de protection sociale que de convoler en justes noces ? »
De l’affaire Dickinson à l’affaire Duclos
Le 18 juillet 1996 une jeune collégienne anglaise est retrouvée morte étouffée après avoir été violée dans le dortoir de l’auberge de Pleines-Fougères près de St-Malo. C’est le début de « l’affaire Dickinson ». A l’époque, l’instruction est confiée au juge Gérard Zaug de St-Malo. Il dispose alors de 2 indices: 1) un morceau de ouate qui a sans doute servi à étouffer la jeune fille, 2) une trace de sperme sur sa cuisse qui doit permettre de faire une analyse ADN.
Un suspect, Patrice Padé est rapidement arrêté. C’est un sans domicile fixe qu’on aurait aperçu rodant près de l’auberge. Il a un casier chargé de quelques affaires de moeurs, faisant ainsi de lui le coupable idéal.
Mis en garde à vue, il avoue rapidement le viol et le crime. Et M. Zaug de tenir aussitôt une conférence de presse pour annoncer que le meurtrier est arrêté. Et ceci avant même que l’analyse ADN ne soit ordonnée.
Lorsque les résultats de l’analyse ADN seront connus, ils disculperont Patrice Padé qui sera alors libéré après cinq mois d’incarcération. Celui-ci racontera alors les conditions de sa garde à vue qui l’amèneront à avouer viol et crime. Une garde à vue indigne (privation de ses médicaments, sevrage brutal d’alcool alors qu’il est alcoolique, refus des gendarmes de suivre les conseils du médecin hospitalier, le tout assorti des fortes pressions de l’interrogatoire).
Il faudra l’insistance du père de Caroline Dickinson pour que l’enquête soit reprise. Il demande au juge ZAUG que soit prélevée l’empreinte génétique de tous les hommes de Pleines-Fougères. Celui-ci refusera. Il sera alors désaissi du dossier au profit du juge Renaud Van Ruymbeke.
Celui-ci établira alors une liste de 200 personnes suspectes, fera établir le portrait robot d’un individu repéré par les jeunes filles rôdant autour de l’auberge. Après élimination resteront trois suspects dont un certain Francisco Arce montes, chauffeur routier espagnol déjà condamné en Allemagne pour des affaires de viol sur mineures. Celui-ci sera retrouvé aux Etats-Unis grâce au portrait robot puis extradé et enfin, confondu par son analyse ADN.
Il comparaîtra devant la cour de justice de Rennes qui le condamnera à 30 ans de prison, verdict confirmé en appel.
Quant à Patrice Padé il recevra 10 000 Francs – payés par le contribuable – pour son incarcération et les sévices de la garde à vue.
Le 23 juillet 1996, Jean-Michel Duclos, commandant de bord et marin au long cours est en vacances à St-Malo. Deux policiers se présentent à son domicile pour lui expliquer qu’une jeune fille l’accusait d’une vingtaine de viols. Placé en garde à vue, il est incarcéré en détention provisoire dans la foulée par le juge Gerard Zaug. «Ce jour-là, le juge d’instruction, je l’ai vu à peine cinq minutes. Le temps de relire et de signer le PV où je jurais que je n’avais jamais vu cette gamine de ma vie.» confiera-il à Libération.
Cinq mois de prison plus tard, dans des conditions de détention épouvantables pour tout homme soupçonné d’être un « pointeur », Jean-Michel Duclos sera libéré, non sans avoir en plus perdu sa femme et ses enfants qui refusaient depuis de le voir : « Il a pourtant suffi à son avocat de quelques heures d’audience devant le tribunal correctionnel de Saint-Malo pour démontrer que les charges qui pesaient sur lui ne tenaient pas. Il a été relaxé. Le parquet, qui avait requis quatre années de prison ferme, n’a même pas fait appel. » explique Libération à l’époque. « Ce n’est jamais avec plaisir qu’on maintient en détention. Si je l’ai fait avec monsieur Duclos, c’est que j’estimais que c’était nécessaire à l’instruction.» avait alors déclaré le magistrat.
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