08/09/2014 – 07H00 Nantes (breizh-info.com) – L’annonce, jeudi dernier, de l’implantation à Nantes d’une nouvelle bio-prothèse cardiaque a mis le monde chirurgical en ébullition. Réalisée au CHU voilà quelques semaines, cette opération est la seconde dans l’histoire de la cardiologie. La première avait eu lieu à l’hôpital parisien Georges-Pompidou en décembre 2013. Le Pr Daniel Duveau, consultant à l’hôpital nantais Laënnec, qui vient de diriger la seconde, participait à la première. Ni le nom du patient ni la date de l’intervention n’ont été précisés.
Pourquoi de telles implantations ? Elles sont réservées aux patients de plus de 65 ans, atteints de lésions cardiaques graves mettant en jeu un pronostic vital. Chez eux, les greffes maintenant classiques sont exclues pour deux raisons. D’abord parce que, compte tenu de la rareté des organes disponibles, les patients plus jeunes sont considérés comme prioritaires. Ensuite parce que les indispensables traitements anti-rejet sont moins bien supportés par des patients devenus très affaiblis, et le risque de mortalité est très élevé, rendant la greffe pratiquement inutile.
La bio-prothèse expérimentée à Nantes pour la seconde fois, avec l’autorisation des comités d’éthique compétents, présente deux avantages théoriques qui doivent être confirmés par l’expérience. Le premier est la compatibilité biologique des matériaux utilisés. Elle permet d’éviter les réactions physiologiques de rejet d’un organe étranger au corps du donneur, et de limiter aussi les risques de formations de caillots ou de thromboses qui seraient fatales au patient. Le second avantage est celui de l’implantation intra-thoracique de la prothèse, qui évite l’hospitalisation alitée et doit permettre une vie sociale normalisée.
Le cas du premier patient parisien, décédé 75 jours l’implantation, n’a pas été commenté officiellement par les intervenants. Il semble que l’arrêt cardiaque ait été dû à un problème électronique interne à la prothèse, et non à une réaction négative du corps du patient. C’est ce qui a conduit les comités d’éthique à autoriser trois nouvelles implantations. Celle réalisée à Nantes est la première de ces trois-là.
Le principe même d’une implantation due à une technique nouvelle, est la part d’inconnu qu’elle comporte. Les prothèses fonctionnent en laboratoire, chez le fabricant, durant des mois. Quelle réaction venue des tissus du patient peut conduire à les dérégler ? L’expérience le dira. Quant au patient lui-même, comment peut-il supporter cette machine ? Il existe de nombreux réseaux neuronaux qui met en lien le rythme cardiaque avec l’activité des parois artérielles, avec des régulations hormonales, avec l’équilibre du milieu intérieur en général. Cette interactivité passe par des systèmes neuro-sympathiques auquel le cœur artificiel ne peut évidemment être relié. Quelle sera, dans le temps, l’évolution de ces interactions ? Des réseaux de compensations peuvent-il apparaître ? Nul ne le sait pour l’instant.
En toute hypothèse, le CHU de Nantes montre avec cette intervention que les dizaines d’années de travaux au cours desquelles l’établissement s’est montré pionnier dans la recherche en bio-matériaux et en transplantation ont porté leur fruit. Il ne suffit pas de se déclarer à la pointe du progrès technique. Il faut le prouver. C’est fait.
Photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2014, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine.