13/07/2014 – 07H00 Paris (Breizh-info.com) – « Fêter, voir et complimenter l’armée française… » C’était le refrain d’En r’venant d’la r’vue, une chanson beuglée par Paulus le 14 juillet 1886 sur la scène du théâtre parisien de l’Alcazar, et pour la gloire du général Boulanger, ministre de la Guerre et ancien condisciple de Clémenceau au lycée de Nantes. La parade militaire, aujourd’hui traditionnelle, datait alors de six ans. Elle s’était invitée dans les célébrations de la fête nationale en juillet 1880, pour le centenaire de la Fête de la Fédération, elle-même réunie sur le Champ-de-Mars le 14 juillet 1790 pour le premier anniversaire de la prise de la Bastille.
Le mythe du peuple en armes, né à Valmy en 1792, est sans fin réactualisé dans les défilés du 14-juillet. Il n’a jamais sonné plus faux que cette année. Le budget de la Défense est en berne, les crédits d’investissement en matériels sont reportés aux exercices à venir, et les effectifs seront en baisse de 34 500 personnels d’ici à 2019, suite à une autre baisse de 45 000 effectifs au cours de la précédente loi de programmation militaire. Jean-Yves Le Drian, ministre de la Défense, disait en juin avoir obtenu l’assurance de l’Elysée que les promesses de maintien de budgets déjà réduits seraient tenues. Les chefs d’état-major des trois armes avaient, paraît-il, mis pour cela leurs démissions dans la balance.
Ils vont pourvoir les remettre. Car si Bercy a semblé un moment céder à l’arbitrage budgétaire de François Hollande, tout est maintenant remis en question. Les recettes exceptionnelles (Rex), censées équilibrer les dépenses, prévoyaient des ventes de casernes, et celle de la fameuse ‘fréquence 700 Mhz’ jusqu’alors affectée à la Défense, fréquence dont la téléphonie mobile serait demandeuse. Dans les faits, les candidats aux rachats des casernes ne sont guère nombreux, voire inexistants en période de crise économique, et la vente de la fréquence miracle ne pourra se faire qu’au terme d’un appel d’offres long et délicat, dans un marché de téléphonie privée dont les opérateurs sont surendettés. En toute hypothèse, aucun argent frais ne sera disponible avant la fin de 2015 au plus tôt, alors que les opérations en cours au Mali (Serval) et en Centrafrique (Sangaris) ont grevé l’essentiel des budgets d’action, et que les matériels restés sur place (cavalerie légère et communication, notamment) ne sont pas remplacés en France.
Comme la loi de programmation ne prévoit rien pour le cas où les ressources affectées ne seraient pas disponibles, même la présidente socialiste de la commission de la Défense à l’Assemblée, Patricia Adam (PS, Finistère), s’inquiète. La présence de soldats algériens au défilé parisien de cette année ne risque pas d’améliorer le moral de la Grande Muette, l’armée algérienne échouant à éradiquer les troupes islamistes et les camps d’entraînement djihadistes situés entre Algérie et Mali. Une incompétence qui a provoqué dans l’opération Serval un rappel de troupes et de drones.
Jean Jaurès (L’armée nouvelle, 1911) avait plaidé contre l’armée de métier pour lui préférer celle du « peuple en armes ». Jacques Chirac a aboli la conscription en 1997. Ses successeurs optent pour une armée désarmée, et pour un peuple sans défense assurée ni assumée. Le défilé du 14-juillet symbolisait le lien entre la nation et l’armée, et la soumission de celle-ci à l’autorité du pouvoir civil. Ce mythe a fait long feu. Les chaussures à semelles collées des soldats français engagés au Mali ou stationnés à Djibouti se décollent au lever du soleil. En 2014, la France n’a plus de quoi équiper ses soldats en chaussures à semelles cousues. Il est vrai que les soldats de Valmy se contentaient de sabots. La duchesse Anne aussi. Mais les djihadistes qui débarquent et s’infiltrent en Europe ont d’autres ressources. Quant au budget militaire de la Chine, il dépasse d’ores et déjà ceux du Royaume-Uni, de l’Allemagne et de la France cumulés. Le reste de l’Asie dépassera l’Europe de l’Ouest en 2015. Le budget russe va croître de 44 % dans les trois prochaines années. L’Algérie est passée de la 26° place mondiale en 2010, à la 20° cette année, juste après Israël. Quant à la France, avec ses 35 Mds d’euros annuels, elle est loin derrière l’Arabie saoudite (44Mds). Rapporté au nombre d’habitants, l’effort est pratiquement de 1 à 4 en faveur de Riyad…
Jean-François Gautier
Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2014, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine.
Une réponse à “Paris. A propos du défilé du 14 juillet …”
C’est triste de voir une France, pourtant si riche en opportunités économiques et en relation étrangère, sombrée peu à peu face à la crise.
Le temps est maintenant à l’action pour assurer un bel avenir au pays.
Et tout commence par chacun de nous.