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La Bretagne et les Bretons vus par un Parisien [interview de saison]

03/06/2014  08H00 Paris (Breizh-info.com) – Alors que l’été approche et que la Bretagne devrait à nouveau accueillir des milliers de touristes dans les prochaines semaines, nous en profitons pour questionner sans détours des personnes venant d’autres régions, afin d’avoir leur vision de la Bretagne, des Bretons, mais aussi de l’actualité locale, de l’avenir de la région.
Nous débutons cette semaine avec l’interview de Vincent « Webmaster », un parisien amateur de voyages et de découvertes à la rencontre des différentes régions de France et d’Europe.

Breizh-info.com : C’est quoi pour toi un Breton ? Quelle image, quels mots te viennent à l’esprit quand on te parle des Bretons et de la Bretagne ?

Vincent :
La mer, la nature, l’agriculture, la pêche….L’authenticité, le terroir, le bon vivre. La Bretagne possède deux facettes, le côté rurale s’oppose notoirement à sa métropole, Rennes.
Rennes représente pour moi toute la déconfiture étatique : éducation nationale, quartiers, pauvreté, délinquance, immigration, jeunesse endoctrinée. Le côté rurale est plus historique, plus authentique, plus bourru aussi.
Je me représente le breton comme un vrai taiseux, tourné vers les richesses de ses terres.

Breizh-info.com :  Y es tu déjà allé ? Si oui, dans quel coins ? Où aimerais tu aller ?

Vincent :
Bien sûr en 36 ans d’existence, j’ai découvert de nombreux aspects de la Bretagne. Dans le désordre : Brest, Quimper, Concarneau, Lorient, Vannes, Morlaix, Guingamp, Dinan, Dinard, St Malo, etc…. A l’avenir j’aimerais pouvoir entrevoir les îles de Houat , Batz, Hoëdic, BREHAT ….

Breizh-info.com :  Nantes en Bretagne, la question de la réunification, ça t »intéresse ? 

Vincent :
C’est un débat d’actualité, teinté d’histoire et d’identité. Après de nombreuses guerres contre les Bretons, l’empire Franc reconnait que seul l’unification (et sa pacification) peut faciliter le rattachement de la Bretagne à l’empire. Ainsi officiellement dès 851 Nantes devient l’une des places fortes du royaume de Bretagne. Au fil des années Rennes devient la capitale politique tandis que Nantes en demeure l’attractivité économique.
Au XXème siècle, la ville sera extraite administrativement de la Bretagne 
après plusieurs programmes : régions économiques « Clémentel » et régions touristiques créées en 1919, régions économiques créées en 1941 par le régime de Vichy.
Puis en 1956 le gouvernement décide de contourner les faits historiques pour promouvoir l’axe Vendée-Pays de Loire, un non sens historique. Pourtant, Nantes reste la ville du château des ducs de Bretagne, d’Anne de Bretagne ou encore de Nominoë.

Tous les partisans d’un statu quo administratif mettent en avant des arguments strictement statistiques et économiques, car en cas de transfert de la Loire-Atlantique en Bretagne, Nantes perdrait son aura de capitale de Pays-de-la-Loire et par je ne sais quel phénomène y perdrait de nombreuses localisation de sociétés, c’est tout simplement du grand n’importe quoi.

Breizh-info.com :  Quel est ton point de vue sur la montée des Bonnets rouges en Bretagne en automne dernier ? Comprends tu la volonté d’une certaine autonomie et la partages tu ? (40% pour les régionalistes dans certains coins du Finistère)

Vincent : On entre dans la définition réelle de la désobéissance civile qui est un refus assumé de se soumettre à une loi, jugée inique par ceux qui le contestent, tout en faisant de ce refus une arme de combat.
Pour autant le gouvernement socialiste y oppose l’idée d’association de malfaiteurs.
Je m’étonne de la condamnation du positionnement politique de certains interpellés par la classe médiadico-politique.
Lorsque l’on entends la sortie de Marie Anne Soubré M’Barki , on peut s’interroger sur la décrépitude de cette classe bourgeoise médiatique. Cette avocate de profession, demande publiquement le remboursement de 500 000 € par portique en stigmatisant les contestataires d’« l’extrême droite, d’autres indépendantistes ou nationalistes bretons ».
Marie-Anne Soubré demande aux Bretons de quitter la France et de renoncer à tous les avantages qu’elle procure aux Bretons (écoles, hôpitaux).
Cette même personne qui déclarait à propos de la population immigrante d’Afrique : « Comment est-ce que vous pouvez justifier de dire à des Français « retournez dans le pays de vos ancêtres » alors qu’ils sont tout aussi français que vous ? » ou encore qu’elle « n’empêcherait pas les jeunes de brûler les voitures. » .

Pour moi le mouvement des Bonnets rouges est un exemple populaire, qui bouscule la classe politico-médiatique.
Esthétiquement le défilé de Quimper à une classe bien supérieur aux mornes revendications syndicales.
Concernant les dernières élections, la première distinction à opérer est de distinguer mouvements indépendantistes et autonomistes. Les indépendantistes souhaitent formellement quitter l’Etat auquel ils appartiennent pour créer une entité propre.
La Catalogne et l’Ecosse abritent ce type de mouvement.
Les autonomistes demandent un transfert de compétence à un niveau régional. Si j’en crois la profession de foi de Christian Troadec, le mouvement demeure très largement autonomiste, il déclare notamment que les décisions politiques actuelles « ne vont pas dans le bon sens », car « elles ne sont pas en prise directe avec les réalités locales ».

Son argumentaire, est basé sur la spécificité économique de la Bretagne. Ce type de replis identitaires est louable à mes yeux, mais il ne doit pas masquer le fait que lors des élections que vous citez, le Front National atteint 17 % des voix (plus de 30% dans de nombreuses communes rurales) pour une région ou les étrangers ne représentent 2 % de la population, et parmi lesquels presque 1 sur 5 est Anglais.
Ces votes sont dûs à l’exaspération d’une population menée par une succession de gouvernements qui peinent à répondre à leur désarroi aux profits d’un autre type de population.
Le faible niveau d’industrialisation de la Bretagne la pauvreté en milieu rurale incitent une population à s’interroger électoralement sur les solutions à apporter à leur quotidien.
En Morbihan, des communes du Pourlet, autour de grosses entreprises ayant fait récemment faillite votent aussi largement Le Pen. Dans cette période de mondialisation à outrance, cela dévoile une prise de conscience de la population bretonne.
Pour ma part je prends ce vote comme un vote Identitaire et Français.

Breizh-info.com : En Bretagne, les parisiens sont souvent « montrés du doigt » pour une certaine forme d’arrogance voir de colonialisme. Notamment car ils occupent de nombreuses maisons secondaires l’été, inhabitées l’hiver sur les côtes bretonnes. C’est un cliché ? C’est dépassé ? Tu as un message à faire passer en tant que parisien ?

Vincent : A mon humble avis cette situation est liée directement à la composition socio-culturelle du « Francilien ».
Une enquête datant de 2005 co-organisée par l’Institut d’Etudes Politiques de Paris et l’ESC Bretagne Brest révèle que 900 000 personnes (habitant en Ile de France) possède un lien direct avec la Bretagne dont 300 000 qui y sont nées.
En résumé cette étude affirme que ce petit million d’exilés se sentent Bretons, avant tout par filiation ou origine.
2/3 d’entre eux déclare se rendre en Bretagne plus de 4 fois par an.
Cette migration est dictée par l’emploi et nombre d’entre eux occupent des fonctions rémunératrices. La distance (environ 4 heures) couplée à ce sentiment d’appartenance font que de nombreuses résidences secondaires sont possédées par des parisiens d’adoption.
Le second élément demeure pour moi dans la perception de la Bretagne par les franciliens « pure souche ». Dans l’imaginaire elle représente l’authenticité naturelle.

Pour la perception d’une certaine forme d’arrogance, il ne faut pas oublier que nous vivons dans un pays jacobin extrêmement centralisé, où Paris demeure le lieu essentiel d’exercice du pouvoir politique et économique du pays.
Le francilien « pure souche » aura donc une exigence toute relative à son statut (plutôt ancré dans l’imaginaire par ailleurs), une sorte d’exutoire. La troisième et dernière forme (mais qui à mes yeux reste très minoritaire
) est l’investissement de la branche « bobo » francilienne. Avec un comportement détestable qui se résume à flatter le Breton sur des stéréotypes et à adopter un comportement « francilien » au sein même de cette région.

Le message me semble clair, il existe une grande disparité de franciliens investissant en Bretagne. Les clichés restent tenaces mais je pense que la majorité des franciliens possédant une maison secondaire y recherchent calme et volupté psychologique.

Breizh-info.com :  Comment imagine tu la Bretagne dans 50 ans ?

Vincent : Les principales villes intégreront une population proche des anciens bassins miniers de l’est.
A savoir un afflux de population immigrante peu qualifiée que le gouvernement aura introduit à grand renfort d’aides en tout genre.
Economiquement, je la vois comme une terre d’expérimentation massive (éoliennes par exemple) où on tenterait d’y exploiter (ou plutôt de faire exploiter) ses richesses.
Elle sera toujours une vaste terre agricole et maritime. Un monde rural et authentique y perdurera, je suis assez optimiste de ce point de vue.
Le degré de décrépitude dépendra de la prise de conscience des Bretons. Et de leur propension à défendre l’exploitation des terres et des richesses locales.
Mais je ne m’en fais pas sur ce point là , la jeunesse semblant reprendre le flambeau d’un ancrage identitaire.
Je remarque que plus les personnes sont éduquées loin de l’Education nationale de masse (Rennes par exemple), plus la prise de conscience est réelle et profonde.

Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2014, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine.

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