27/05/2014 – 08H00 Édimbourg (Breizh-info.com) – Le Scottish National Party (SNP) n’a pas réussi à conquérir un troisième siège sur les six réservés à l’Écosse lors des élections européennes. Le siège perdu par les LibDems est allé à l’United Kingdom Independent Party (Ukip), le parti anti-européen de Nigel Farage. Mais l’euroscepticisme est-il la seule cause du revers relatif subi par les nationalistes ? Probablement pas.
Le SNP devra s’interroger sur la tactique électorale de son leader, le Premier ministre Alex Salmond. Celui-ci a tenu à cultiver explicitement le vote des Écossais d’origine étrangère. En troisième position sur la liste du SNP, il a placé Tasmina Ahmed-Sheikh, 44 ans, musulmane pratiquante, née de père indien et de mère galloise, mariée à un producteur de cinéma pakistanais. Ce choix a étonné. Certains se sont interrogés sur la sincérité politique d’une femme qui a été militante du parti conservateur, puis du parti travailliste, puis à nouveau du parti conservateur, avant de devenir nationaliste.
Le SNP a perdu 7 ou 8 points en une semaine
Candidate conservatrice à Glasgow Govan aux élections au parlement écossais de 1999, Tasmina Ahmed-Sheikh s’en était vivement pris à Alex Salmond, qui critiquait alors l’intervention de l’Otan contre les Serbes au Kosovo – une « folie impardonnable », disait-il. Battue à plate couture avec moins de 9 % des suffrages, elle avait adhéré au SNP l’année suivante en prétextant un désaccord avec les positions anti-immigration d’un leader conservateur. Pas rancunier, Alex Salmond l’avait accueillie à bras ouverts. De cette jeune femme aux dents longues, il voulait clairement faire son principal agent électoral auprès des Écossais d’origine extra-européenne.
À ces derniers, il a clairement mis le marché en main au cours de la campagne pour l’élection européenne. Après avoir visité la grande mosquée de Glasgow le 16 mai, il déclarait dans un communiqué : « l’arithmétique des urnes est très claire, le sixième siège écossais ira soit au SNP soit à l’Ukip. La seule issue certaine pour empêcher l’Ukip de s’implanter en Écosse […] est de voter SNP jeudi prochain pour élire Tasmina Ahmed-Sheikh. » À cette date, comme Breizh-info l’a noté hier, les sondages attribuaient au SNP 36 ou 37 % des voix. Six jours plus tard, il n’en obtenait pas 29 %. L’appel du pied d’Alex Salmond en direction des musulmans a-t-il contribué à ce vif repli ?
Alex Salmond sur la sellette
Un sondage effectué dans la première quinzaine de mai le laisse penser. Ce sondage, très sérieux – il a été effectué par Survation pour Five Million Questions, une initiative de l’université de Dundee – mais rapidement mis sous le boisseau, a révélé qu’à défaut de voter pour l’Ukip, les Écossais soutenaient à 68,4 % les positions anti-immigration de ce parti. Cette position était partagée par 68,8 % des électeurs du SNP – moins que chez les Conservateurs (84,4 %) mais plus que chez les Travaillistes (67,7 %).
Le gouvernement conservateur britannique a d’ailleurs bien compris la leçon : hostile à l’indépendance écossaise il vient de publier une étude du Trésor affirmant qu’une Écosse indépendante aurait besoin de 500.000 immigrants en vingt ans pour assurer l’équilibre de ses régimes de retraite – « soit l’équivalent d’une ville de la taille d’Édimbourg ». « On les trouvera », a répondu en substance le gouvernement écossais. Mais il n’est pas du tout certain que ses électeurs en aient envie.
Alex Salmond va donc devoir s’interroger d’urgence sur sa ligne politique. D’autant plus que, selon un autre sondage effectué à la même époque pour le Daily Record, 36 % des Écossais se sentiraient dissuadés de voter oui au référendum à cause de sa personnalité, contre 12 % que celle-ci attirerait vers le oui. Or le temps presse : le référendum, c’est dans moins de quatre mois.