15/03/2014 – 08H00 Nantes (Breizh-info.com) – Mardi, Nexus, l’association britto-angevine de citoyens « proposants » en matière de transports publics, exposait devant cinq des dix candidats aux municipales de Nantes et la presse sa stratégie en matière de transports publics. L’association se bat notamment pour la création à plein d’une véritable étoile ferroviaire nantaise et pour un port de croisières dans Nantes. Etaient présents Xavier Bruckert (Modem), Pierre Gobet (société civile), Benoît du Rieu de Maynadier pour la liste de Sophie Van Goethem (divers droite), Christian Bouchet (FN) et Marc Renaume pour la liste de Laurence Garnier. Hélène Defrance (LO) était excusée. La gauche avait préféré ignorer le débat.
Annie le Gal la Salle et l’ingénieur Bernard Fourage ont ainsi exposé les projets portés par l’association. Parmi ceux-ci, l’opposition au projet officiel de restructuration de la gare de Nantes, par l’ajout d’une passerelle et l’extension de la gare nord : « C’est un projet d’architecte et non d’usager ; ce qu’il faut surtout, c’est désencombrer la gare ». Ils proposent une « avant-gare » à Malakoff pour utiliser à plein le triangle qui permet de relier le nord-Loire au sud-Loire : les usagers pourront ainsi transiter, par exemple de la Vendée vers Paris ou Rennes, sans s’arrêter en ville.
L’étoile ferroviaire nantaise, une mine de possibilités
Nexus veut surtout mettre fin au gâchis de la non-utilisation des capacités pourtant énormes de l’étoile ferroviaire nantaise. Actuellement, la ligne Nantes-Carquefou est quasi gelée. Les rails vers Nantes-Etat ne servent qu’à quelques trains de fret et de ballast par jour. Et à la sortie ouest de la gare, le rail est enfermé dans le très dangereux tunnel de Chantenay – qui plus est inondable – empêchant toute connexion du train et du centre-ville nantais.
Ils proposent donc de réactiver toutes ces lignes, en permettant la « diamétralisation », pour créer des itinéraires permettant aux usagers de traverser de part en part l’agglomération. Ils proposent aussi de créer des gares sur le trajet des rails dans l’Ile, notamment à Beaulieu, sur le boulevard Gustave Roch, vers la gare de l’Etat et au hangar à Bananes. Le but, en créant ce TER/RER sur l’Ile, serait à la fois de faire l’équivalent d’une cinquième ligne de tramway, mais nettement moins cher puisque les rails existent déjà, mais surtout de profiter du fait que les rails – quatre voies – arrivent au hangar à Bananes, cent mètres derrière la grue grise, pour créer là un pont ferroviaire vers Chantenay et shunter le tunnel. Le rail remis à l’air libre permettrait aussi de recréer une antenne vers l’ancienne gare de la Bourse, ou plutôt son équivalent sur le terre-plein de la Petite Hollande, pour les actifs travaillant en plein centre.
Aux futurs candidats, ils demandent avant tout de l’écoute – « Prenez en compte l’usager ! » -plutôt que le projet d’architecte, beau sur le papier mais inapte à l’exploitation. Mais aussi une vision globale sur trois projets importants : les reports modaux autour de l’étoile ferroviaire nantaise – par l’adaptation des lignes de bus, de cars départementaux et des emplacements de parkings-relais – mais aussi le contournement de Nantes via le doublement au nord et à l’est de l’axe Pontchâteau – Nort – Ancenis (RD16 et RD164) ainsi que le projet latent de nouveau franchissement à l’ouest, entre Paimboeuf et Donges. Attention aux franchissements cependant, « c’est créer une pompe à voitures. La priorité est avant tout de désengorger le périphérique ». C’est pourquoi l’association ne défend pas le doublement du pont Anne de Bretagne qui aurait comme conséquence logique d’engorger plus encore le pont des Trois Continents vers Rezé, la pénétrante sud (RD723) et le quai de la Fosse.
Desservir Nantes-Atlantique par rail
L’exploitation des possibilités de l’étoile ferroviaire nantaise rend tout possible. Par exemple, desservir l’aéroport existant et donc le pérenniser. C’est ce que souligne Michel Decré, qui soutient le projet de l’association : « dans les années 1980, il y avait eu une étude avec la SNCF avec Jean Costé. Nous étions tous deux vice-présidents de l’association gestionnaire de l’aéroport. A l’époque nous venions de faire allonger la piste pour utiliser des Boeing 747 vers Chicago, New York et Atlanta. Le but aurait été d’utiliser les rails pour amener les passagers à l’aérogare et les y récupérer, en les dédouanant directement dans la rame. » L’intérêt était assez important pour les compagnies américaines, malmenées à Roissy et pour les usagers qui pouvaient gagner avec Nantes 1h50 dans leur déplacement, puisqu’il n’y a pas de points d’attente au-dessus de la capitale bretonne comme il y en a autour des plateformes parisiennes. « Ce projet a été cependant complètement barré sur le plan psychologique, et avec l’opposition d’Air France ». Néanmoins, amener les usagers à Nantes-Atlantique par rail reste logique de nos jours : l’aéroport est ainsi à quelques minutes de la ville et à deux heures de Paris.
Un port de croisières à Nantes
Surtout, le franchissement ferroviaire et l’utilisation à plein des grandes capacités du chemin de fer nantais – par exemple par l’établissement d’une gare à la Bourse, enfin la Petite Hollande – permet aussi de réactiver le port de croisières à Nantes. Plutôt que sur le quai Wilson, désolé et éloigné du centre-ville, l’association se tient au projet de l’association les Transbordés et du géographe breton Yves Lainé (à consulter ici ) sur le quai Saint-Louis. Celui-ci soutient un port de croisière à côté du musée Jules Verne, non loin de la gare maritime et devant les anciens Grands Moulins – un bâtiment revêtu d’un bardage bleu depuis les années 1970 (CAP44) et qui fut l’un des premiers édifices en béton armé (Hennebique) de l’ouest de la France.
De ce côté, l’abattage d’un hangar pour augmenter le plan d’eau permet de mettre à quai un paquebot de 150 mètres qui peut se retourner dans le cercle à cet effet situé plus avant, entre le quai Saint-Louis, le futur pont, la pointe de l’île et Rezé. Le tirant d’eau et d’air disponible est suffisant. La position assez centrale du port permettrait aussi d’éviter la noria de cars et charger tout le monde dans le train pour aller au centre de Nantes. Enfin, elle permettrait, outre un gain d’image et de profits commerciaux assez important pour la ville, de redynamiser le quartier, en installant les services commerciaux et douaniers dans les anciens Grands Moulins – et selon le projet des Transbordés convertir le square Maurice Schwob situé sur le plateau de Chantenay, au-dessus de l’ancienne carrière de Misery en friche depuis l’abattage des brasseries de la Meuse, en grande volière Audubon.
Le rail permet surtout de maximiser les possibilités : « Votre croisière, elle commence à Montparnasse. Vous sautez dans le TGV et dans deux heures maximum vous êtes devant votre bateau. Ou alors elle commence à Nantes-Atlantique, et pour passer de l’avion au bateau il vous faut moins d’une heure. » En revanche, si le transfert de l’aéroport se fait à Notre-Dame des Landes, l’intermodalité deviendra compliquée, sinon impossible. La plateforme rurale est bien trop excentrée.
Le tram-train : le tout-politique n’engendre que des surcoûts et des problèmes
Enfin, Nexus s’est livrée à l’exposition des problèmes du tram-train, un matériel qui manque toujours de fiabilité , mais surtout qui a eu l’immense mérite de saccager littéralement les possibilités offertes par la ligne Nantes-Châteaubriant pour créer une liaison bis vers Rennes et désencombrer l’axe Nantes-Savenay-Redon, tout en faisant gagner 30 km pour l’usager. Une nouvelle ligne Nantes-Rennes permettait aussi de connecter le sud de la Mayenne, le pays de Blain et le Castelbriantais aux deux métropoles, en lien avec la RN171 sur laquelle la liaison bus (notamment la ligne 71) est quasi inexistante.
En effet, la région des Pays-de-la-Loire avait choisi dès le début le tram-train… et passé commande plusieurs mois avant l’enquête publique puisqu’il y a un délai moyen de trois ans de la commande à la réception. Résultat, l’enquête avait été court-circuitée et les associations ou collectifs défendant une ligne TER avec du matériel classique muselées. Résultat aussi, il a fallu électrifier, « ce qui n’était pas urgent après la Chapelle sur Erdre », donc abaisser la plate-forme de la ligne, démolir un pont routier au-dessus du chemin de fer… et neutraliser l’emplacement de la seconde voie en y plantant les poteaux de la caténaire. Le jour où il faudra doubler la voie ou faire un évitement – une courte section à deux voies permettant aux trains de se croiser et donc à la ligne de supporter un trafic plus grand – on imagine sans peine que les coûts des travaux en seront nettement augmentés.
« Il faut écouter les associations, sans les museler, et faire preuve de bon sens », s’adresse Nexus aux candidats. Ce qui n’a visiblement pas été le cas avec le tram-train. Résultat, le matériel, spécifique à la ligne, nécessite un atelier pour lui tout seul (à Doulon, distinct des ateliers SNCF du Blottereau), est incompatible avec le tramway, et ceux qui ont été recasés en urgence entre Nantes et Clisson encombrent surtout l’axe Nantes – la Roche-sur-Yon. Ils sont en effet limités à 100 km/h, ce qui n’est pas (trop) gênant de Nantes à Châteaubriant mais vraiment rédhibitoire sur l’axe Nantes – la Roche où circulent des trains à 140 km/h. « Et surtout, ça empêche de développer la ligne. A quoi bon supprimer des passages à niveau pour passer la vitesse maximum à 160 ou 180 km/h » si c’est pour que les trains circulent derrière des tram-trains tortillards limités à 100 à l’heure ?
Résultat des courses, le tram-train ne trouve grâce nulle part. Une bonne leçon aux frais du contribuable breton : « Soyez donc très attentif lorsque vous serez au pouvoir. Aujourd’hui, M. Bontemps, vice-président du conseil régional, dit que le choix du tram-train a été fait contre l’avis de la SNCF, de Nantes Métropole, le besoin des usagers, leur volonté et les études de transport ». L’aménagement de la gare de Châteaubriant, avec ses butoirs en plein milieu qui isolent le tram-train de la ligne TER – à requalifier – vers Rennes, laisse aussi pantois tant il constitue une hérésie en matière de transports publics. Clairement, la liaison rapide vers Rennes a été complètement saccagée, probablement du fait de l’incompétence des élus et des tensions entre la Bretagne et les Pays de la Loire. L’interdiction de la ligne au fret fait aussi grincer des dents dans l’industrie castelbriantaise. Les intérêts de la ville ont-ils été seulement pris en compte ?
Pourtant RFF a limité les dégâts, en chargeant la ligne de façon à permettre que roule un jour du matériel voyageur classique (par exemple es AGC bi-modes, électriques jusqu’à Châteaubriant, diesel après) et des trains de fret. Bref, écouter les usagers et développer l’étoile ferroviaire nantaise, en permettant les trajets transversaux, de Rennes à la Vendée, de Saint-Nazaire en Anjou, permettrait de limiter les frais pour les contribuables, l’inconfort pour les usagers et donnerait des atouts à Nantes. « On peut faire des choses beaucoup plus formidables que les Elephants faits pour une population code-barres », conclut ainsi l’association Nexus.
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