Suisse : une majorité vote contre l’immigration de masse

14/02/2014 – 06H00 Genève (Breizh-info.com) –  Un référendum d’initiative populaire a eu lieu le 9 Février en Suisse ; plusieurs questions étaient posées aux électeurs de la Confédération mais une d’entre elles concernaient un sujet sensible : l’immigration de masse. Le parti UDC qui est à l’origine de cette votation souhaitait que les Suisses puissent se prononcer sur l’immigration de masse que connait leur pays depuis la signature d’un accord avec l’Union Européenne portant sur la liberté de circulation des personnes. Cet accord qui aurait du se traduire par une augmentation des entrées en Suisse de 8000 personnes par an a conduit à l’arrivée de 80000 migrants supplémentaires chaque année, soit 1% de la population (à l’échelle de la France, cela représenterait 650000 migrants supplémentaires chaque année). L’UDC estime que cet afflux crée de gros problèmes, en matière d’infrastructures, de logements et de niveau des salaires, entre autres, à un pays qui est ‘’plein comme un œuf’’.

Comme ce fut le cas en 2009, quand l’UDC a initié une votation portant sur la construction de minarets, les classes politique, économique, médiatique et intellectuelle de Suisse et d’Europe se sont mobilisées contre le projet ‘’ignoble’’ et elles ont perdu la partie….et la face. Cette fois-ci l’Union Européenne a mobilisé son état-major qui a menacé de son gros gourdin le peuple suisse des pires mesures de rétorsion s’il votait mal ! Et il a mal voté. Décidément les ‘’élites’’ ne tiennent plus les peuples qui sont de plus en plus rétifs et enclins à la dissidence.

Les vertus de la démocratie directe

Les  Suisses ont la chance immense de pouvoir organiser des référendums d’initiative populaire sans qu’il leur soit nécessaire d’obtenir un accord préalable des élites politiciennes (contrairement au dispositif, mis en place par Nicolas Sarkozy et revu à la baisse par François Hollande, qui n’est pas un référendum d’initiative populaire mais un référendum d’initiative essentiellement parlementaire). La seule contrainte imposée aux initiateurs de référendums par la Constitution suisse est une pétition de 100000 signatures de citoyens favorables à l’initiative dans un délai de 18 mois. Cette institution importante permet au peuple de modifier ou d’annuler des lois votées par les représentants et d’en créer de nouvelles ; elle permet aussi au peuple de se prononcer sur des sujets que les représentants ignorent par conformisme intellectuel ou du fait de la pression des lobbies.

Depuis la fin du dix-huitième siècle et sous l’influence de Montesquieu et des libéraux anglais, les auteurs de nos constitutions ont pensé que pour limiter les risques d’une tyrannie étatique il fallait séparer les trois pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire). Mais  le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif sont dans les faits totalement imbriqués et solidaires ; quant au pouvoir judiciaire qui, en réalité, n’en est pas vraiment un puisque il n’est qu’un organe d’application des décisions prises par le pouvoir législatif au service du pouvoir exécutif, il se doit d’être totalement neutre et impartial, ce qui n’est pas toujours le cas ! Comme l’a fait remarquer le constitutionnaliste allemand Hans Herbert von Arnim, il n’y a pas en régime parlementaire de séparation des pouvoirs parce que les chefs du parti dominant au parlement sont aussi membres du gouvernement. La prétendue séparation des pouvoirs censée nous protéger d’une éventuelle tyrannie étatique est en fait inexistante. De plus, dans notre système politique, il n’y a pas de recours populaire possible face à l’éventualité d’une tyrannie d’un groupe de partis politiques dominants et indifférents à la volonté de la majorité, ce qui a totalement échappé aux rédacteurs de nos constitutions, lesquels, influencés par la philosophie politique libérale, se sont toujours méfié des humeurs populaires.

Or c’est très exactement dans cette situation que nous nous trouvons. Ce que nous constatons aujourd’hui, c’est que la démocratie purement représentative peut générer une césure, voire une opposition, entre représentants et représentés. Cette dérive du système démocratique est une conséquence de son ‘’verrouillage’’ par deux partis politiques dominants, de l’absence d’un contre-pouvoir populaire et  sans nul doute de l’influence considérable que les possesseurs de grandes fortunes et les dirigeants des grandes entreprises transnationales ont sur les partis politiques comme le suggère le ‘’Prix Nobel’’ d’économie Joseph Stiglitz dans son dernier ouvrage. Certaines constitutions permettent sans doute plus que d’autres ce genre de dérive mais une chose est certaine, c’est que notre actuelle constitution s’y prête parfaitement. La caste dirigeante française est totalement déconnectée du peuple et cela ne pourra pas durer parce qu’une telle situation est incompatible avec l’esprit de la démocratie qui veut que ce soit la volonté populaire majoritaire qui s’impose et parce que le peuple français ne supporte plus la situation présente et aspire à une république référendaire (72% de partisans du référendum d’initiative populaire selon un sondage IFOP de 2011 contre 12% d’opposants).

Les Français sont désormais très majoritairement conscients des défauts et des limites du système représentatif – voir à ce sujet l’étude du CEVIPOF de Décembre 2013 et le sondage réalisé par IPSOS le 28 Janvier 2014 pour Le Monde –  et il est de plus en plus évident que le régime connaît une crise dont seule l’introduction du référendum d’initiative populaire pourra nous faire sortir parce que c’est la seule institution susceptible de nous permettre d’en finir avec la tyrannie des partis et de rendre le pouvoir au peuple souverain.

B. Guillard

Photo : hublera/Flickr (cc)
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