08/01/2014 – 06H00 Quimper (Breizh-info.com) – « Délinquance : le sévère constat d’un général ». C’est sous ce titre que Le Figaro (07/01/2014) relate la déposition faite le 18 décembre dernier par le général Soubelet, directeur des opérations et de l’emploi de la Gendarmerie nationale devant la commission parlementaire de «lutte contre l’insécurité». Une déposition sans langue de bois qui a entraîné illico une mise au point furibarde de Jean-Jacques Urvoas sur son blog. Une opération « déminage » qui est loin de convaincre.
Pour le député du Finistère (PS), le quotidien parisien « reprend et tronque des propos tenus le 18 décembre par le Général Soubelet (…). Probablement l’ambition est-elle de chercher à allumer un incendie entre les forces de sécurité et les magistrats afin de clouer au pilori une nouvelle fois la Garde des Sceaux et sa politique pénale. »
Qu’a dit précisément le numéro 3 de la gendarmerie nationale ? Selon Le Figaro, après avoir prévenu les parlementaires que son analyse personnelle pourrait paraître « un peu iconoclaste», celui qui est à la tête des opérations et de l’emploi de la gendarmerie nationale a exposé tranquillement, pendant près d’une heure et demie, ce qu’il pense de la politique pénale suivie par l’actuel gouvernement.
«Les gendarmes sont inquiets, déclare le général, car on prend plus soin des auteurs que des victimes». Pour preuve, si les services de la gendarmerie ont réussi à mettre en cause 4% de personnes de plus en 2013, dans la même période le nombre de personnes écrouées a diminué de 33%. «Évidemment, l’insécurité et le sentiment d’insécurité ne cesseront d’augmenter tant que la réponse collective à la délinquance ne sera pas adaptée», affirme-t-il, faisant observer au passage que «les auteurs d’atteintes aux biens (cambriolages, vols…), les plus importantes numériquement, bénéficient d’un traitement pénal qui leur permet de continuer à exercer leurs activités.»
Et de citer l’exemple des Bouches-du-Rhône où 65% des cambrioleurs interpellés en novembre 2013 «sont à nouveau dans la nature». «Quand vous lâchez 65% de ceux qui se sont rendus coupables d’un certain nombre d’exactions, comment voulez-vous que les chiffres baissent ?, s’interroge le haut gradé, C’est tout à fait impossible. Vous pouvez multiplier par deux les effectifs de gendarmes dans les Bouches-du-Rhône, cela ne changerait rien. La réalité, c’est celle-là, je pense que c’est mon devoir de vous le dire, de manière peut-être un peu crue.» Effectivement.
Enfonçant le clou, le général signale que dans un département – qu’il ne cite pas – le parquet recommande de «mettre dehors» les présumés délinquants mineurs étrangers faute de «moyens» pour trouver un interprète. Il précise également que le «critère de valeur» pour une garde à vue est qu’à «moins de 300 euros» de préjudice «on remet tout le monde dehors». Résultat : «Aujourd’hui, toute une frange de notre jeunesse ne sait pas où est le bien et où est le mal. On peut très tôt donner un message clair. »
On comprend mieux l’irritation de Jean-Jacques Urvoas. Que la presse fasse état de ces propos tenus publiquement devant les parlementaires par un spécialiste reconnu des questions de sécurité ne pouvait que déplaire à ce socialiste qui préside la commission des lois de l’Assemblée nationale. Pour ce dernier, toute vérité n’est pas bonne à dire. Rappeler ces propos, explique-t-il, c’est en réalité « chercher à allumer un incendie entre les forces de sécurité et les magistrats afin de clouer au pilori une nouvelle fois la Garde des Sceaux et sa politique pénale. »
En réalité, explique l’élu finistérien, « [le général Soubelet] n’a cessé de souligner sans ambiguïté l’étroite relation existant entre la magistrature et la gendarmerie. (…) Il a évidemment appelé au « partage et à la solidarité » de tous les acteurs pour lutter contre l’insécurité.» Et Jean-Jacques Urvoas de conclure « Contrairement donc à ce que laisse supposer l’article incriminé, le général a donc battu en brèche l’idée d’une explosion de la délinquance et d’un laxisme supposé de l’actuel gouvernement. »
Autrement dit, les propos du général Soubelet cités dans l’article du Figaro sont soit inexacts soit tronqués. Tout ça pour nuire à la garde des Sceaux Christiane Taubira dont la politique pénale est, c’est bien connu, tout sauf laxiste. C’est du moins ce que tente de faire croire Jean-Jacques Urvoas. Mission de déminage accomplie, donc. Pas certain toutefois qu’elle soit réussie.
Photo : Ericwaltr/Wikimedia (cc)
[cc] Breizh-info.com, 2013, dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine.
Une réponse à “Délinquance : J.J. Urvoas tente de déminer le constat sévère dressé par un général de la gendarmerie”
oui, on va tous dans le mur c’est clair…. il n’y a plus de pilote dans l’avion…