27/12/2013 – 06H00 Nantes (Breizh-info.com) Dans un précédent article intitulé « Les communes bretonnes sont-elles trop généreuses avec leurs fonctionnaires ? », Breizh-info s’est penché sur les récents rapports de la Chambre des comptes de Bretagne. Ils révèlent une tendance des communes à accorder à leur personnel de nombreux avantages en matière de salaires, d’avancement et/ou de congés.
Cet article avait suscité une réponse de M. Louis Vallernaud, président de la Chambre régionale des comptes des Pays de la Loire, soulignant que le thème de la gestion du personnel était également traité attentivement par sa juridiction. Voici les exemples cités par le président Vallernaud :
Extraits des rapports d’observations définitives (ROD) adressées aux communes et communautés de communes de Loire-Atlantique (années 2012 et 2013)
Commune de Pornichet (ROD du 13 janvier 2012)
Les charges de gestion évoluent de 13,2 % entre 2005 et 2009. Le poste des dépenses de personnel est, de loin, le plus lourd de la section de fonctionnement. En moyenne, il représente près de 60 % des charges de gestion. Ce poste a cru de 14,8 % sur la période, pour atteindre 9,2 M€ en 2009. Mais l’essentiel de la progression, due aux recrutements, a concerné les années 2005 à 2008, avec un rythme de progression de 5 % par an, les dépenses de personnel étant restées stables entre 2008 et 2009 et n’ayant progressé que de 2 % en 2010.
(…)
De 2005 à 2011, les effectifs permanents de Pornichet ont progressé de 6 %, passant de 214 à 227. Cette progression s’est opérée principalement en début de période, les effectifs ayant régressé de 232 à 227 depuis 2007.
Le nombre de contractuels est faible mais il s’est accentué depuis 2008, avant de régresser depuis lors.
Les charges de personnel ont fortement progressé entre 2005 et 2008, à un rythme de 5 % par an, passant de 8 M€ en 2005 à 9,2 M€ en 2008, puis se sont stabilisées jusqu’en 2011. L’essentiel de la hausse des années 2005-2007 découle des recrutements alors qu’entre 2007 et 2009, la hausse s’explique avant tout par des mesures locales.
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Avant 2008, le recours à des agents non-titulaires était très marginal. Depuis cette date et jusqu’en 2010, 10 agents non-titulaires permanents ont été recrutés. De plus, tous les agents de catégorie A recrutés ont été des agents non-titulaires, hormis le directeur général des services. Depuis lors, avec le départ de non-titulaires remplacés par des mutations de fonctionnaire ou non remplacés et avec le succès à des concours d’autres non-titulaires, cette tendance se serait inversée.
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Dans trois cas, la collectivité a adopté des délibérations ouvrant un poste spécifiquement offert à un agent non-titulaire. En conséquence, ces délibérations étaient irrégulières.
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Selon l’article 3 de la loi n° 84-53 susmentionnée, les collectivités peuvent recourir à des agents non titulaires (ANT) dans trois types de situations distincts : L’étude des recrutements de non-titulaires a fait apparaître plusieurs cas qui n’entraient pas dans le cadre exposé ci-dessus. Il s’agit de deux agents recrutés sur des postes de catégorie B hors cas de besoin occasionnel, de remplacement ou de vacance de poste. Les cadres d’emploi existaient dans la fonction publique territoriale. Les deux situations ont été régularisées en 2010. Néanmoins, la chambre recommande à la collectivité de limiter, à l’avenir, le recrutement d’agents non-titulaires aux cas prévus par l’article 3 de la loi de 1984.
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En application de l’article 41 de la loi de janvier 1984, « lorsqu’un emploi est créé ou devient vacant, l’autorité territoriale en informe le centre de gestion compétent qui assure la publicité de la création ou de la vacance ». La jurisprudence confirme le caractère obligatoire de cette procédure pour tous les emplois. Dans quatre recrutements, cet avis n’a pas été émis. Il en est de même pour deux renouvellements de CDD de un an. Dans trois autres cas, l’avis de vacance est postérieur aux entretiens d’embauche voire à l’entrée en poste. Les recrutements ainsi que les renouvellements effectués en 2010 respectent cette étape de la procédure.
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La systématisation du recours à des agents non titulaires pour occuper des fonctions de cadre A, au cours des années 2008 et 2009, a été problématique. Si elle correspondait parfois à une nécessité, d’autres cas semblaient peu justifiés alors que les postes correspondaient à des profils classiques de la FPT et que l’attractivité de la ville était en mesure de limiter les difficultés de recrutement.
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Ainsi, la durée du temps de travail dans les services de la ville, par ailleurs régulière car fixée avant la loi de 2001, est inférieure de 68 heures au temps de travail légal de la FPT, fixé à 1 607 heures annuelles. Ce choix représente une charge de 11,5 équivalents temps pleins.
(…)
Les bilans sociaux dénotent une forte progression de l’absentéisme global (+ 26 %), due essentiellement aux absences pour raison de santé : maladie ordinaire (+ 33 %), arrêts pour accidents du travail et maladie professionnelle (+ 171 %). Ramené au nombre d’agents, l’absentéisme de la ville de Pornichet s’est dégradé au cours de la période, suivant ainsi une tendance nationale.
Commune de Guérande (ROD du 24 septembre 2012)
Les dépenses de personnel, qui représentent 46 % des charges de gestion, ont progressé de 25,3 % pour atteindre 7,6 M€ en 2010, soit à un rythme de 5,8 % par an. La hausse du début de période, 8,1 % entre 2006 et 2007, était plus forte qu’en fin de période, 4 % entre 2009 et 2010. Cette augmentation est essentiellement expliquée par la croissance de l’effectif de 18 ETP (équivalents temps plein). Néanmoins, la part des dépenses de personnel dans les produits et les charges de fonctionnement de la commune est restée stable.
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La chambre a examiné la régularité du régime indemnitaire, son organisation et sa bonne application dans la rémunération des agents. Ces deux derniers volets n’appellent pas d’observation. Contrairement aux dispositions réglementaires, la délibération de 2003 n’indique ni le taux moyen ni le mode de calcul des indemnités[1]. Pour certaines primes (IHTS, IAT, ISS) la collectivité n’a pas déterminé précisément les filières, les cadres emplois et les grades bénéficiaires. Enfin, aucun coefficient multiplicateur choisi par la commune n’est mentionné. La délibération de 2005 instaure un régime d’astreintes, et les indemnités destinées à les compenser, au bénéfice des « agents du service des sports ». En ciblant ainsi un service et non un cadre d’emploi, la délibération n’est pas suffisamment précise au regard des dispositions réglementaires[2].
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L’absentéisme des agents municipaux a représenté un total de 4 507 jours en 2009 (dernier bilan social connu) contre 3 450 jours en 2005, soit une hausse de 31 %, essentiellement due à la progression de 54 % des arrêts pour maladie ordinaire. Rapporté au nombre d’agents, l’absentéisme de Guérande est passé de 19,1 jours par agent en 2005 à 22,9 en 2009, soit une hausse de 20 %. Ce faisant, alors qu’il était significativement inférieur à la moyenne nationale en début de période, il a convergé avec celle-ci en fin de période (22 jours en 2005 et 23 jours en 2009). La situation globale de l’absentéisme n’est pas préoccupante, quand on la compare aux moyennes nationales. Toutefois, l’absentéisme pour maladie ordinaire a connu une forte progression sur la période, qui représente un coût pour la collectivité et appelle, en plus de son suivi que la collectivité a mis en place à travers des tableaux de bord mensuels, à la fois un diagnostic des causes et une réponse adaptée.
Commune de Saint-Brévin (ROD du 15 octobre 2012)
Le ratio de la part des dépenses de personnel du budget principal dans les dépenses de fonctionnement se détériore légèrement sur la période passant de 44 % en 2006 à 46,8 % en 2010 mais reste inférieur à la moyenne de la strate qui est de 54 %.
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Le pourcentage des charges nettes de personnel du budget principal n’est donc pas excessif. Les effectifs sont restés stables depuis 2006 si l’on excepte la progression due aux recrutements des contrats d’avenir. La ville étant une destination touristique, les besoins en effectif entraîne un accroissement du personnel en période estivale d’environ 60 personnes.
Le coefficient de rigidité, qui mesure la part des frais de personnel et des intérêts des emprunts dans les recettes réelles de fonctionnement, évolue favorablement au cours de la période, passant de 49,8 % à 44,2 %.
Communauté de communes Erdre et Gesvres (ROD du 21 janvier 2013)
Les charges de personnel, qui absorbent 17,6 % des crédits de fonctionnement, soit 2,3 M€ en 2011, ont été multipliées par deux depuis 2006. Cette forte augmentation est liée au renforcement de la structure administrative et à l’approfondissement des compétences qui ont conduit à un doublement des effectifs. Le niveau de ces charges reste cependant inférieur à celui constaté au niveau national en 2011 (43 €/hab. contre 67 €/hab.), bien qu’elles continuent de progresser de façon très soutenue au budget primitif 2012 (+ 21 %) en raison notamment de la mise en place de la redevance d’enlèvement des ordures ménagères.
Communauté de communes Sud Estuaire (ROD du 28 février 2013)
Les charges de personnel, poste le plus important des dépenses de fonctionnement, ont augmenté de 6,3 % en moyenne annuelle. L’augmentation des frais de personnel sur la période est liée à la mise en place de nouveaux services à la population : accueils périscolaires et accueils de loisirs.
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Il conviendrait que la CCSE demande à l’association ACLEJ (Accueil Loisir, Enfance et Jeunesse) de Saint-Brevin-les-Pins le remboursement du coût des mises à disposition de personnel réalisées depuis l’entrée en vigueur des dispositions précitées de la loi du 2 février 2007 (les dépenses correspondantes ont atteint 228 k€ entre 2007 et 2010). En toute hypothèse, pour l’avenir, la CCSE doit désormais se conformer à la loi, ce à quoi elle s’est engagée.
Commune de La Turballe (ROD du 26 avril 2013)
Ce sont les dépenses de personnel qui augmentent le plus : leur progression est bien supérieure (15,5 %) à celle des charges à caractère général (4,1 %). Cependant, comparées à celles de la strate, les dépenses de personnel représentent une proportion plus faible des dépenses de fonctionnement, et une charge par habitant légèrement moins élevée.
L’augmentation des dépenses de personnel au cours de la période est due principalement aux créations de postes (titularisations) et aux avancements. Le solde net (créations / suppressions de postes) résultant des décisions du conseil municipal est de six créations de 2007 à 2010. Les avancements de grade prononcés par exemple en 2009 sont au nombre de 19. Le bilan social montre que la masse des rémunérations brutes des seuls fonctionnaires croît en quatre ans (2007-2011) de près de 40 % ; certes, elle se substitue en partie à celle des non-titulaires.
Commune de La Baule (ROD du 7 juin 2013)
L’évolution de la dépense de personnel, la plus importante du budget avec près de 13,5 M€ en 2010, reste modérée (+10 %), traduisant la volonté affichée par la municipalité de la maîtriser. Son niveau se révèle élevé puisqu’il dépasse de 30 % la moyenne nationale : en 2010, la commune consacre en effet 784 € par habitant à cette charge contre 588 € de moyenne. Il convient toutefois de préciser que la dépense de personnel ne représente que 48 % des dépenses réelles de fonctionnement de la ville de La Baule, alors que pour les communes comparables, ce taux s’établit en moyenne à plus de 57 %.
Les effectifs titulaires évoluent de façon différenciée sur la période. Le nombre de titulaires est resté relativement stable entre 2006 et 2010, mais il s’est accru pour la filière administrative et a diminué pour la filière technique. Les effectifs de la police municipale ont augmenté de 30 %, passant de 9 à 12 policiers. Un poste de directeur général adjoint des services a été créé en 2007.
(…)
Les emplois budgétés ont été pourvus à 94 % en 2010 contre 95 % en 2006. En 2010, c’est sur la filière technique que les postes pourvus sont, en moyenne, le plus en deçà des prévisions budgétaires ( – 16 postes).
Parallèlement, de 2006 à 2008, la commune a eu recours à un nombre constant d’agents non titulaires sur emplois permanents répertoriés, pour la majeure partie en vacataires de la filière technique. Cet effectif a évolué par la suite, passant de 24 agents en 2008 à 27 en 2009 puis 30 en 2010 (…)
Les modalités de recours à des non-titulaires sur postes permanents ont parfois ignoré les obligations de priorité d’emploi de fonctionnaires titulaires qui s’imposent à la commune en vertu de la loi du 26 janvier 1984[3] comme le révèle la situation de certains non titulaires dont le renouvellement du contrat est intervenu durant la période sous revue (…).
La commune a également éprouvé une certaine difficulté à inscrire l’emploi de certains de ses professeurs de musique dans un cadre juridique régulier (…)
Si les déclarations de vacances auprès du centre de gestion ont été régulièrement effectuées pour ces postes, aucune annonce n’a été diffusée afin de recruter des agents titulaires.
En tant qu’employeur, la commune peut se targuer d’un excellent taux d’absentéisme en matière d’accident du travail et de maladie professionnelle, 0,7 jour par agent en 2009, à comparer à la moyenne observable en Loire-Atlantique qui s’élève à 3,1 jours.
[1] L’article 2 du décret n° 91-875 du 6 septembre1991 modifié par décret n° 2003-1013 du 23 octobre 2003 dispose que « l’assemblée délibérante de la collectivité […] fixe, dans les limites prévues à l’article 1er, la nature, les conditions d’attribution et le taux moyen des indemnités applicables aux fonctionnaires de ces collectivités ou établissements ».
[2] L’article 5 du décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001 précise que « l’organe délibérant de la collectivité ou de l’établissement détermine, […] la liste des emplois concernés ».
[3] Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.
Crédit photo hôtel de ville de Pornichet [cc] Patrice78500 via Wikimedia Commons ; La Baule, La Turballe, Guérande, [cc] Goodcitiesfordreamers via Wikimedia Commons
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