26/12/2013 – 06H00 Paris (Breizh-info.com) – Funeste jour que ce 10 juillet 2008 pour Patrick Poivre d’Arvor : il est viré de TF1. Adieu des dix millions de téléspectateurs qui suivaient son journal télévisé de vingt heures. Depuis, il effectue des petits boulots : une biographie d’Hemingway, qui lui valut d’être accusé de plagiat, un petit polar, un autre livre dans lequel une ancienne maîtresse prétend se reconnaitre et l’attaque en justice pour atteinte à la vie privée et contrefaçon de lettres ou de SMS… Il y eut même une tentative de retour à la télévision – sur France 3 – avec un magazine. Echec, il n’y eut qu’une émission.
A la vérité, son départ de TF1 fut une perte pour la Bretagne car, avec le PDG de l’époque, Patrick Le Lay, ils s’efforçaient de la faire bénéficier d’un traitement de faveur. Nous « braconnons », avouait M. Le Lay. D’où, par exemple, la retransmission du Festival inter-celtique de Lorient en direct.
Malheureusement les temps ont changé. Pour plaire à l’ancien président de la République, Nicolas Sarkozy, PPDA, puis Le Lay, ont été renvoyés dans leurs foyers. Donc la Bretagne a beaucoup perdu avec ces départs ; elle n’est plus l’invitée d’honneur de TF1.
Mais le 6 janvier prochain « Poivre » revient aux fourneaux ; il animera la tranche d’information du soir (19-20 heures) de Radio Classique, propriété de Bernard Arnault. Certes, de dix millions de téléspectateurs, il passera à un million d’auditeurs quotidiens (1,9% d’audience en cumulé). Il échangera un public populaire contre une audience comparée de CSP++, cadres et chefs d’entreprise. Retour aux premières amours puisque Patrick Poivre d’Arvor avait débuté comme journaliste en 1972 à France-Inter. Aujourd’hui sa notoriété demeure forte car, cinq ans après son départ de TF1, sa marionnette fait toujours le bonheur des Guignols de l’info de Canal+.
A Radio Classique, grâce à son arrivée, la Bretagne bénéficiera évidemment d’une certaine complaisance. Toucher les décideurs n’est pas forcément inutile.
Bien sûr, un retour à France Inter eût été plus glorieux et les moyens sans commune mesure. A un moment où la diffusion ne se porte pas très bien, PPDA aurait pu rendre de grands services. C’est ce que montrent les derniers sondages réalisés par Médiamétrie. Avec 9,9% d’audience cumulée en septembre-octobre, France Inter perd 0,7 point en un an, soit 370 000 auditeurs, ce qui n’est pas rien (Le Monde magazine, 07/12/2013). En appuyant sur la tonalité « gauche sociétale » – la « petite musique » de l’antenne sonne plutôt à gauche (Le Monde télévision, 01-02/12/2013) -, le directeur nommé sous le mandat de Nicolas Sarkozy, Philippe Val, n’a pas arrangé les choses. Ainsi, « malgré l’exaspération croissante des auditeurs, Pascale Clark a été renouvelée », s’agace une voix bien connue des auditeurs. Résultat : sur sa tranche horaire, 76 500 personnes ont préféré aller voir ailleurs comme on leur parle (Ciné télé Obs, 07/12/2013). Cet été, l’interview quotidienne de Caroline Fourest (12-13 heures) ressemblait fort à un suicide journalistique en direct ; si on avait voulu couler France-Inter, on ne s’y serait pas pris autrement. Et ce n’est pas Patrick Cohen, le responsable de la matinale de la station – « On a le droit de penser ce qu’on veut dans les limites de la loi » (« C à vous » 12/03/2013) –, qui pourra améliorer les choses.
Pour Jérôme Bouvier, médiateur de Radio France, le courrier des auditeurs reflètent leur colère envers une station qu’ils jugent de plus en plus parisianiste, éloignée de leur réalité. Mais Philippe Val s’en moque : « France Inter est sans doute le dernier média de masse qui revendique la beauté de la vie intellectuelle et qui s’en nourrit pour la partager avec tous. » (Le Monde, 01-02/12/2013). C’est sans doute pour cela qu’il a recruté Frédéric Mitterrand pour la tranche 18/19 heures ! Un véritable supplice pour l’auditeur de base.
Photo : Georges Seguin (Okki)/Wikimedia (cc)
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