07/11/2013 -07H00 Nantes (Breizh-info.com) – La concertation, Jean-Marc Ayrault en parle beaucoup mais la pratique peu. Le 16 octobre, à la suite d’une réunion ministérielle sur la Bretagne, le Premier ministre déclarait : « Le gouvernement a décidé d’engager un ‘pacte d’avenir’ pour la Bretagne. Il comprend des mesures d’urgence, à mettre en oeuvre immédiatement, mais aussi des actions plus durables, que nous allons formaliser d’ici la fin de l’année après une large concertation avec les forces vives, économiques, sociales et politiques. » Le soin de cette concertation était confié au préfet de Bretagne, Patrick Strzoda.
« Le dialogue a pu avoir lieu et il y a eu concertation, cet objectif est rempli », a déclaré ce dernier hier. Une formule que beaucoup jugent « surréaliste » : aucun représentant du collectif des bonnets rouges n’a participé à la réunion, aucune mesure concrète n’a été décidée, et pendant que se déroulait cette prétendue concertation le Premier ministre affirmait que l’écotaxe n’était pas discutable. On a vu mieux en fait de « large concertation avec les forces vives » !
Or il est probable que le préfet a exactement appliqué le désir du Premier ministre. Qu’une « concertation » décidée par Jean-Marc Ayrault relève de la simple poudre aux yeux n’aura pas étonné les Nantais : c’est exactement conforme à sa pratique municipale. Pendant ses vingt-trois ans à la barre de la ville et de la communauté urbaine, l’opposition municipale lui a constamment reproché une totale absence de dialogue réel : la concertation façon Ayrault consistait à annoncer des décisions irrévocablement prises. Même les concertations imposées par la loi se bornaient en fait à la présentation de projets déjà arrêtés.
Il en a été ainsi dernièrement pour l’aménagement de lignes de Chronobus. « Nous considérons que la concertation mise en œuvre est aujourd’hui largement suffisante » déclarait Jean-Marc Ayrault en décembre 2011 avant d’agir exactement comme il l’avait décidé, sans tenir compte des demandes des habitants (et ce n’était même pas dans un but d’efficacité, puisque le budget prévu a été dépassé de 20 %). Sophie van Goethem, aujourd’hui candidate de centre-droit aux prochaines élections municipales, exposait ainsi la situation :
« Le projet Chronobus, voté par le Conseil Communautaire de Nantes Métropole (…) impacte également l’aménagement de la ville de Nantes de manière très importante dans certains secteurs. Cela aurait pu être l’occasion de mettre en place une concertation des Nantais. Pourtant de tous les points de vue, celle-ci a été un échec. Tout d’abord, aucune information ou discussion n’a été organisée au sein du Conseil Municipal. Les élus de l’opposition n’ont par ailleurs été informés d’aucune réunion publique, contrairement aux élus de la majorité. Ensuite, la « démarche de projet adoptée » a été de « saucissonner » par tranches de voiries les réunions publiques, sans jamais proposer une vision d’ensemble des projets (Pour ma part, j’en suis à 4 réunions sur les lignes 22 et 56 uniquement sur mon quartier). A ces réunions, seuls étaient invités les habitants ayant reçu des invitations dans leurs boites aux lettres. L’information, incomplète, était parfois relayée par la presse ou le site internet de Nantes Métropole. Et la distribution des invitations aux réunions a été très sélective selon les quartiers, et les rues. (…) Enfin, les Conseils de quartiers (…) n’ont pas été consultés sur ces aménagements. »
Des critiques analogues ont été exprimées sur les thèmes les plus divers : aménagements de la place Graslin, des abords du château des ducs de Bretagne et du boulevard de la Solidarité, transfert du CHU sur l’île de Nantes, ouverture des magasins le dimanche, création d’un conseil de la biodiversité, politique du tourisme, projets immobiliers, etc. Selon l’opposition municipale nantaise, le double langage sur la concertation, loin d’être un « loupé » occasionnel, est un aspect systématique de l’exercice du pouvoir par Jean-Marc Ayrault. Mais transposer cette pratique des quartiers de Nantes à toute une région comme la Bretagne, et au-delà à la France entière, ne va pas sans risque.
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