25/10/2013 – 11h00 – Nantes (Breizh-info.com) – Les partisans de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes tirent-ils leurs dernières cartouches ? Ils viennent de lancer une campagne d’opinion sur le thème : « un nouvel aéroport, c’est des emplois supplémentaires ». Jeudi, le quotidien Presse Océan a barré toute sa Une avec le titre : « Les pro-aéroport misent sur l’emploi ».
C’est un peu une boîte de Pandore, tant les arguments avancés sont fragiles. Il comprennent deux volets.
Le premier est bien sûr la construction même de l’aéroport, qui donnera du travail au BTP. C’est évident : pour construire des pistes, il faut des bras. Mais l’argument du chantier est délicat. Pendant des années, les partisans de l’aéroport se sont efforcés de le présenter comme peu coûteux et peu invasif. Il leur est difficile à présent d’y voir une réalisation colossale. « C’est un beau chantier mais pas pharaonique », déclare d’ailleurs à Presse Océan le patron d’ETPO, qui assurerait la construction.
Construire un aéroport occupe du monde, mais ni plus ni moins que construire des ronds-points supplémentaires ou de creuser des trous pour y déposer la terre retirée d’autres trous. Le soutien de l’économie par le BTP a montré ses limites au Japon depuis trente ans : au nom de l’emploi, les Japonais ont artificialisé plus d’un tiers de leurs côtes. Ça n’a pas relancé l’économie, ça n’a pas empêché le tsunami, et ça leur a valu la dette publique la plus élevée du monde par tête d’habitant. Une fois l’aéroport construit, que devrait-on bétonner pour maintenir l’emploi ?
Le deuxième argument porte sur le fonctionnement de l’aéroport. Il est encore plus difficile à manier pour ses partisans. Il ne peuvent pas aller jusqu’à prétendre que, transféré de Château-Bougon à Notre-Dame-des-Landes, l’aéroport deviendrait moins efficient, exigeant plus de personnel pour accueillir autant de passagers ! Ils invoquent plutôt une augmentation du nombre de passagers : plus de cinq millions en 2020 contre 3,5 millions en 2012. À cette augmentation d’environ 45 % du nombre de passagers correspondrait une augmentation identique du nombre de salariés : 2.900 en 2020 contre 2.000 aujourd’hui.
« Ce raisonnement est complètement spécieux », assure un habitué de Nantes Atlantique, qui énumère ses fragilités. Un, personne ne peut affirmer que le trafic va augmenter dans une telle proportion. Deux, les effets d’une augmentation du trafic de passagers se feraient sentir à Nantes Atlantique tout autant qu’à Notre-Dame-des-Landes, sachant que l’aéroport actuel peut parfaitement accueillir cinq millions de passagers. Trois, l’effectif employé ne dépend pas seulement du nombre de passagers mais aussi du nombre de mouvements d’aéronefs, qui en réalité recule. Quatre, la progression du nombre de passagers à Nantes concerne uniquement le trafic low-cost, qui exige moins de personnel (par exemple, moins de bagagistes puisque les bagages en soute sont beaucoup moins nombreux). Cinq, Aéroport du Grand Ouest (Nantes et Saint-Nazaire) peut améliorer sa productivité, donc en faire plus avec autant de monde, car le chiffre d’affaires par agent y est l’un des plus faibles des grands aéroports français (il est 7 % plus élevé à Bordeaux et 24 % à Nice) ; comme le révèle le dernier rapport d’activité des aéroports établi par la direction générale de l’aviation civile (DGAC).
Le même document montre d’ailleurs que l’effectif propre d’Aéroport du Grand Ouest (Nantes et Saint-Nazaire) n’a augmenté que de 13 % de 2007 à 2011 alors que le nombre de passagers a progressé de 25 % dans le même temps. « À trop tirer sur les prévisions, les pro-aéroport fragilisent leur dossier au lieu de le renforcer », conclut notre interlocuteur.
Crédit photo (aéroport de Nantes Atlantique) : Pymouss44, licence cc via Wikimedia
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