18/10/2013 – 09H30 Rennes (Breizh-info.com) – L’écotaxe poids lourds est censée entrer en vigueur le 1er janvier 2014, après un report de quatre mois dû aux bugs du système. L’entreprise Ecomouv, qui installe les portiques dans tout le pays a commencé a enregistrer les véhicules, une étape obligatoire pour tous les camions de plus de 3.5 T, qui permet la délivrance des équipements embarqués obligatoires (boitiers de géolocalisation) devant équiper tous les véhicules assujettis à l’écotaxe. Lorsque le camion passera sous les portiques, il sera ainsi suivi dans ses déplacements afin d’acquitter la taxe.
Pour l’heure, les transporteurs routiers et leurs organisations représentatives refusent d’aller chercher les boîtiers – qui peuvent être délivrés tant par Ecomouv que les sociétés de télépéage agréées. La taxe suscite aussi l’ire des entrepreneurs bretons, notamment ceux du secteur agroalimentaire qui font valoir l’éloignement de la Bretagne des grands centres de décision européens, mais aussi la perte de compétitivité. En effet, avant d’être mis en vente, l’animal sera d’abord transporté de la couveuse à l’élevage, puis de l’élevage à l’abattoir, de là à l’usine de transformation, et enfin de l’usine à la centrale d’achats voire au supermarché… et il sera taxé autant de fois.
C’est pourquoi les Bretons ont littéralement déclaré la guerre à l’éco-taxe, abattant début août le portique de Guiclan (29) puis un second début octobre à Melgven, entre Quimper et Lorient. Toujours début octobre, le boîtier électrique du portique de Saint-Allouestre a été forcé, rendant l’installation inutilisable. Enfin, un particulier a mis la gendarmerie sur les dents en proposant à la vente sur le site Le Bon Coin « des morceaux de portique écotaxe » de Pont-de-Buis les Quimerch, « démontés dans la semaine ».
L’agroalimentaire emploie actuellement plus de 80.000 personnes en Bretagne dont 11.000 en Loire-Atlantique. Le secteur subit de plein fouet la concurrence européenne surtout de la part de pays où la force de travail est moins chère (Espagne, Pologne) ou alors qui emploient massivement des travailleurs étrangers peu chers (Allemagne), créant ainsi des conditions de dumping social.
Dans ce contexte, le surcroît de pression fiscale instauré par l’éco-taxe est un arrêt de mort pour l’économie bretonne. L’intervention de l’Etat se résume là encore à un emplâtre sur une jambe de bois : le premier ministre a promis 15 millions d’euros pour le secteur, une somme plus destinée à accompagner la Bretagne pendant qu’elle meurt qu’à créer les conditions d’un retour à la compétitivité. Une somme surtout qui montre que le gouvernement de Paris a quelque peu du mal à compter. Si 15 millions d’euros représentent une paille par rapport aux fermetures d’entreprises en cours, c’est aussi une broutille par rapport aux revenus annuels de l’éco-taxe (1.15 milliards d’euros). Ainsi, l’Etat prend le risque d’enterrer l’agroalimentaire breton – un des rares secteurs de l’économie française qui continue vaillamment à exporter et à soutenir la balance commerciale – pour le prix d’un plat de lentilles. Où est la vision à long terme ?
LB Greffe
Photo : Semnoz/Wikimedia (cc)
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