COP 22. Démographie responsable lance une pétition pour que la surpopulation mondiale soit évoquée [interview]

06/10/2016 – 06H45 France (Breizh-info.com) –La COP 22 – conférence sur le climat – se tiendra en novembre 2016 à Marrakech. A cette occasion, une pétition vient d’être lancée par l’association écologiste Démographie Responsable afin que la démographie mondiale soit évoquée durant ce sommet – ce qui n’est pas prévue actuellement.

« En incitant à l’autolimitation de la natalité, notre association a pour objet d’œuvrer pour la stabilisation, voire la diminution, de la population humaine. Excluant tout ce qui ne respecterait pas les droits humains ou qui remettrait en cause la liberté de procréer, notre démarche passe par une bonne information de chacun(e) sur les conséquences de la pression démographique pour les générations futures, les autres espèces et l’environnement. En parallèle à cette bonne information, nous nous donnons entre autre pour mission de soutenir toutes les initiatives en faveur de l’instruction, condition nécessaire à la compréhension par tout être humain des dangers écologiques liés à la surpopulation.» explique l’association dans sa présentation.

Nous avons rencontré Denis Garnier, président de l’association que nous avions déjà interrogé par le passé, à l’approche de la COP 22, qui est loin d’intéresser les médias européens pour le moment, cette dernière ne se déroulant pas sur notre continent.

Breizh-info.com : Pouvez-vous nous présenter la COP 22 ? Pourquoi cela arrive-t-il aussi rapidement après la COP 21 ?

Denis Garnier : Les conférences sur le climat « Conférence Of Parties » ont lieu tous les ans. La première s’est tenue à Berlin en 1995. Les plus connues ont eu lieu à Kyoto en 1997, à Copenhague en 2009 et enfin la 21ème à Paris l’an dernier. La vingt-deuxième aura donc lieu à Marrakech, au Maroc, du 7 au 18 novembre prochain.

Il y sera bien sûr question à nouveau du climat, mais avec un regard particulier en direction de l’Afrique, à la fois parce que cette grand-messe a lieu sur son sol, mais surtout parce que le changement climatique y aura des effets profonds. Dans un article figurant en bonne place sur le site de la COP, on peut d’ailleurs lire ceci : « Selon l’UNICEF, l’Afrique, qui compte actuellement 1,2 milliard d’habitants, verra sa population doubler d’ici 2050, et comptera 4,2 milliards d’individus d’ici 2100 »… soit l’équivalent de la population mondiale en 1976 !

Breizh-info.com : Vous réclamez (Démographie Responsable) l’instauration d’un débat sur la démographie lors de ce sommet, pourquoi ?

Denis Garnier : Il est évident que le nombre de personnes joue un rôle sur les émissions globales de CO2, puisque celles-ci sont le produit des émissions individuelles par le nombre d’habitants. Or, depuis le début du vingtième siècle, nous avons connu une importante explosion démographique, la population ayant été multipliée par quatre … le même coefficient se retrouvant d’ailleurs pour les Etats-Unis, pays parmi les plus pollueurs de la planète. Bien sûr il s’agit là du passé, mais c’est en prenant conscience des erreurs commises hier que l’on pourra éventuellement éviter de les reproduire demain.

Or, pas loin de quatre milliards d’habitants supplémentaires sont attendus d’ici la fin du siècle, essentiellement dans les pays en développement. Si cette population a accès à un développement minimal, elle émettra alors au moins 1,3 tonne de CO2 par personne et par an*, ce que l’on appelle les « Gaz à Effet de Serre (GES) vitaux »

. Cela correspondra globalement à près de 5 milliards de tonnes de CO2 supplémentaires, soit 15% des émissions totales actuelles. Et encore ne s’agit-il ici que d’une estimation basse et sur la base des émissions d’aujourd’hui. Or, à la COP21, les états les plus émetteurs ont pris l’engagement de faire baisser leurs émissions et l’on sera peut-être alors plus près du quart des émissions globales de 2100…

Aussi, à Démographie Responsable, nous pensons que l’on ne peut ignorer plus longtemps ce facteur population et qu’il faut absolument l’intégrer aux discussions : c’est d’ailleurs pour cette raison que nous avons lancé une pétition intitulée « Pour que la démographie soit évoquée à la COP22 ».

Breizh-info.com : Comment réduire la population mondiale ? Quelles mesures préconisez-vous ?

Denis Garnier : Il faut tout d’abord comprendre que l’on ne peut pas « réduire » la population mondiale, du moins pas avant la deuxième partie de ce siècle. Tout au plus pourrait-on essayer de ralentir sa progression et se fixer un objectif de stabilisation autour de 8,5 milliards vers 2050 (comparés aux 7,4 d’aujourd’hui).

Une décroissance serait ensuite possible, mais elle devrait être « responsable », c’est-à-dire pas trop rapide pour ne pas déstabiliser nos sociétés, en leur laissant le temps de s’adapter à une économie et un effectif décroissants.

Quant aux mesures, elles sont connues : il s’agit tout d’abord de répondre à la demande insatisfaite de contraception qui touche autour de 200 millions de femmes des pays en développement. Dans le même temps, il faut promouvoir la Planification Familiale via des campagnes de sensibilisation et sans doute dans certains cas mettre en place des mesures financières incitatives. Bien entendu, à la base de tout, il faut faire en sorte que les jeunes filles aillent à l’école le plus longtemps possible, entre autre de façon à s’émanciper. Cette dernière mesure étant sans doute la plus coûteuse**.

Enfin, au niveau législatif, l’âge au mariage doit être reculé le plus tard possible et les grossesses précoces absolument évitées. Au final, on voit bien que l’on n’est pas démuni pour affronter cette question et qu’il s’agit uniquement d’une volonté politique nationale et internationale.

Breizh-info.com : Comment expliquez-vous que les responsables politiques écologistes n’évoquent jamais la démographie ? Est-ce un sujet tabou ? La défense du cannabis ou d’une agriculture sans OGM est-elle plus importante ?

Denis Garnier : Les « responsables politiques écologistes » français adhèrent à une idéologie proche de celle de l’extrême gauche, ce qui les conduit à une vision manichéenne du monde, avec d’un côté les méchants-riches-pollueurs et de l’autre les gentils-pauvres-exploités.

Il leur est donc pratiquement impossible d’accepter que l’on remette en cause l’attitude procréatrice de ces derniers, bien qu’ils ne soient pas malgré tout les seuls concernés, puisqu’il existe des familles aisées nombreuses…

Et il est malheureusement vrai que ces « écologistes » sont plus prompts à se mobiliser pour la légalisation du cannabis ou les droits des « transgenres » que pour la défense de la faune menacée et plus généralement de tout ce qui concerne la protection de la nature et de la biodiversité. D’ailleurs, celles et ceux qui sont sur cette ligne sont affublés du qualificatif « d’environnementalistes », terme considéré comme péjoratif…

Breizh-info.com : Quelles sont les causes de la croissance démographique mondiale exponentielle ?

Denis Garnier : La cause fondamentale de cette croissance est la baisse de la mortalité infantile, elle-même due aux améliorations de l’hygiène et de la médecine, ce qui en soi est une bonne chose. Remarquons au passage que les femmes ne font pas plus d’enfants qu’autrefois, mais que par contre elles les gardent presque tous : les plus forts taux de mortalité avant 5 ans sont aux alentours de 15%.

On aurait ainsi pu espérer que les taux de fécondité s’adaptent en baissant. Or, ils restent élevés en raison d’une sorte d’effet d’aubaine. En effet, les enfants pouvant être très tôt mis au travail dans les champs, envoyés éventuellement plus tard à l’étranger et enfin servir de bâton de vieillesse, l’intérêt des familles est encore d’en faire beaucoup. Par continent, c’est l’Afrique qui est en tête de la fécondité avec 4,7 enfants par femme en moyenne… avec une pointe à 7,6 pour le Niger !

Autre élément important : l’âge médian de la population, avec encore un record pour le Niger où la moitié de la population a moins de 15 ans et possède ainsi plusieurs générations de géniteurs potentiels.

Enfin, le faible taux d’utilisation des méthodes contraceptives (15 à 20%) conduit un grand nombre de femmes à tomber enceinte tous les 2 ou 3 ans, ce d’autant plus qu’une famille nombreuse est une sorte de preuve de virilité pour les hommes et que leur femme sont sous l’influence de leur belle-famille.

Breizh-info.com : Selon vos analyses, quel sera l’état du monde en 2050 ? En 2100 ?

Denis Garnier : Sur la base des dernières projections onusiennes, actualisées tous les 2 ans et datant de l’été 2015, sur le plan démographique nous pourrions être 9,6 milliards en 2050 et 11,2 milliards en 2100. Qu’en sera-t-il en conséquence de « l’état du monde » ? Nul ne le sait, bien évidemment, et nous pas plus que les autres.

Par contre, il est clair que tous les problèmes actuels et à venir seraient plus faciles à résoudre si nous n’étions pas toujours plus nombreux, que ce soit sur le plan environnemental ou sur celui de l’approvisionnement en ressources diverses.

Entre autre conséquence, on peut redouter que les migrations auxquelles on assiste aujourd’hui ne soient que le prélude à une déferlante encore beaucoup plus massive…

Breizh-info.com : Notre planète va-t-elle pouvoir nourrir tout le monde ?

Denis Garnier : Actuellement, la planète ne nourrit pas tout le monde, ou du moins fort mal puisque près d’un milliard de personnes souffrent de la faim. Cependant, il est possible aujourd’hui de produire suffisamment et d’acheminer la nourriture là où elle fait défaut, mais en utilisant une agriculture intensive à base d’engrais et de pesticides issus des énergies fossiles et en ayant recours aux transports maritimes et aériens énergivores. Qu’en sera-t-il dans le monde en pénurie énergétique qui nous attend ?

Certains agronomes soutiennent que l’agriculture biologique locale pourra alors se substituer, sans se rendre compte qu’ils se basent sur des expériences limitées, situées dans des endroits propices sur le plan climatique mais aussi stables sur le plan politique et social, toutes choses qui risquent de faire défaut dans un monde surchauffé et surpeuplé…

Ceci étant, les craintes de Démographie Responsable ne portent pas prioritairement sur cette question alimentaire. Nous sommes encore plus inquiets en ce qui concerne par exemple l’approvisionnement en eau douce, qui lorsqu’elle fait défaut ne peut pas être transportée en quantité suffisante ou encore sur la question de la biodiversité qui n’est pas « remplaçable » à notre échelle de temps ou encore sur celle des équilibres géopolitiques.

*Un français émet 5 tonnes par an, un américain 17 et un koweïti 28…

**Lorsque l’on sait par exemple que la France, avec ses 66 millions d’habitants, consacre près de 48 milliards d’euros à l’éducation nationale…

http://www.cop22.ma/fr/content/le-changement-climatique-en-afrique

http://www.cyberacteurs.org/cyberactions/que-demographie-soit-evoquee-cop-1207.html

Propos recueillis par Yann Vallerie

Crédit photos : DR
[cc] Breizh-info.com, 2016 dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine

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Une réponse à “COP 22. Démographie responsable lance une pétition pour que la surpopulation mondiale soit évoquée [interview]”

  1. Canville dit :

    je crois que René DUMONT en avait parlé –

    il y a des années, j’ai lu un article sur le magazine « nouvelles clés » concernant Mr Di Giorno et son polyter, et j’ai retrouvé cela :

    http://www.lemauricien.com/article/philippe-ouaki-di-giorno-inventeur-francais-je-sais-me-mettre-la-peau-des-plantes

    je me dis qu’il faudrait planter des baobabs et faire reculer le désert –

    maintenant la contraception, c’est un autre problème : piloche ???? – en Afrique – les labos doivent être contents

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