Danielle Simonnet (Parti de gauche), a présenté le 14 juin au Conseil de Paris un vœu appelant à « donner le nom de Robespierre à une rue, une place ou un autre lieu à Paris ». Cette proposition – qui a été rejetée, seuls le groupe communiste et quelques élus socialistes ayant voté pour – a inspiré notre chroniqueur Morasse…
Qui croit encore que l’Histoire ne repasse pas les plats ? Nous avons, en ce moment, la démonstration du contraire. Les valeureux descendants des sans-culottes arrivent sur le devant de la scène. Leurs « émotions », comme on disait au temps des rois, s’épuisent en plaies et bosses au point qu’il est impossible de discerner entre hooligans professionnels, d’inspiration britanno-soviétique, et casseurs d’ancienne façon. La vision qu’offre nos villes – Nantes et Rennes, Marseille et Paris – est terrifiante pour le petit commerce, les clients des agences bancaires et les adeptes du tourisme.
On brise à tout va pour faire plier le gouvernement. Un régiment de dragons – « d’Ancien Régime » disent les méchantes langues – réglerait la question en moins de temps que nécessaire. Fâcheuse option, n’est-il pas ? Le summum a été atteint lors du bris de glaces d’un hôpital parisien : celui où l’on soigne les petits enfants malades, l’hôpital Necker (encore un aristo, sans doute)*. Le temps n’est plus aux beaux uniformes, aux casques à crinière – sauf pour l’escorte du président et de ses invités royaux. Des chevaux, n’en parlons pas. Et les coups de sabre – où ai-je la tête ?
Conjointement, une conseillère municipale « Front de gauche » appuyée par des historiens pétitionnistes « osent tout : c’est même à ça qu’on les reconnaît », disait Michel Audiard. M’enfin, c’est la démocratie ! Ils se sont dévotement, « faisant la chattemite », adressés à la bourgmestre de Paris pour qu’une rue, une place, un square… que sais-je ? portât le nom de Maximilien de Robespierre, d’illustre mémoire. Bien qu’il fût enterré aux Errancis, autrement dit au parc Monceau – lieu sinistre par temps d’orage -, on nous refait le coup du « cimetière de la Madeleine ». De ce livre de Regnault-Warin, paru en 1800, naquit le mythe de la survivance de Louis XVII – qui n’a pas, triste enfant, de lieu dédié à sa mémoire, sinon un bistrot sur le boulevard Lamoignon de Malesherbe. On n’y croit guère. On brocarde. On jette aux orties les thuriféraires.
En revanche, la survivance de Robespierre est assurée par cette panerée d’historiens, la petite trentaine, dont pas plus du tiers mérite l’AOC (appellation d’origine contrôlée). Ces trente révolutionnaires de la survivance pourraient aussi demander l’apposition de plaques à la mémoire de Collot d’Herbois, à Paris et à Nice, de Couthon, le bancroche, de Carrier, à Nantes, de Jean-Lambert Tallien à Bordeaux, de Claude-Alexandre Ysabeau à Paris – encore qu’il mériterait pour avoir lancé à Robespierre, le 9 Thermidor, cette apostrophe : « Oui, tyran, tu es le plus scélérat des hommes, l’heure de ton trépas a sonné ! » Et ne pas oublier le gendarme Merda, qui brisa le menton du « tyran » d’un coup de pistolet.
Il existe un réservoir inépuisable d’où l’on extraira Barère de Vieuzac, dont Lyon s’honorerait de célébrer la mémoire : « Cette ville rebelle doit être ensevelie sous ses ruines… Ce seul mot dira tout : Lyon fit la guerre à la Liberté, Lyon n’est plus. » Sans parler de la Vendée qui devint « inexplicable » pour le Tarbais de « Vieux Sac » (c’est de Camille Desmoulins) : « L’inexplicable Vendée existe encore et les efforts des républicains ont été jusqu’à présent impuissants contre les brigandages et les complots des royalistes qu’elle recèle. La Vendée, ce creuset où s’épure la population nationale, devrait être anéantie depuis longtemps et elle menace de devenir un volcan dangereux. »
Il avait conclu en disant : « Détruisez la Vendée ; Lyon ne résistera plus, Toulon s’insurgera contre les Espagnols et les Anglais et l’esprit de Marseille se relèvera à la hauteur de la révolution républicaine. […] La Vendée et encore la Vendée, voilà le (cancer) politique qui dévore le coeur de la République française; c’est là qu’il faut frapper… «
Ces historiens-là n’ont pas lu Joseph Lequinio, député du Morbihan à la Convention de 1792-93 (un rouge très jacobin), qui, dès 1794, désignait le vrai responsable : « Robespierre fut l’âme de toutes ces horreurs, le souffle invisible qui inspire sans conseiller, détermine sans exhorter, et fait exécuter aux autres ses propres desseins, en leur laissant croire qu’ils ne cèdent qu’à un penchant naturel et à leurs propres passions (…) Robespierre voulait arriver au trône ; il fallait qu’il régnât ; or, le pervers qui veut régner, le veut à quelque prix que ce puisse être. Sur des monceaux de cadavres, il établirait son trône ; il aimerait mieux régner sur des ossemens que de ne pas régner. » On en restera-là…
Morasse
* Un héros règne sur ce désordre. Il vient de la métallurgie automobile. On l’a remarqué tout de suite chez les nauséeux : il porte d’invraisemblables moustaches. D’un noir de jais alors que son crâne est dégarni par l’âge. C’est la reconstitution très-réussie d’un homme du peuple, façon d’avant-guerre au temps de La Belle Equipe. Franc-parler, coeur sur la main, intransigeance en fond de sauce. Peppone en moins tolérant… et, assure-t-il, pas communiste du tout.
Crédit photo : DR
[cc] Breizh-info.com, 2016 dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine
Une réponse à “Faire des moustaches à Robespierre”
Ha le sinistre Martinez, espérons qu’ il aura son tour sur l’ échaffaud !!!!!